Conception
graphique et montage : Jean-Marie Jolly
Histoires de frontière avec la
Belgique
Après un numéro 14, presque entièrement dévolu à la boisson
pour fêter la réouverture des cafés, restaurants et hôtels,
ce 15e et avant-dernier journal entend fêter,
avec un peu de retard, la réouverture de la frontière avec
la Belgique.
C?est avec beaucoup d?étonnement que nous avons aperçu,
grâce à FR3 Champagne-Ardenne, sur les parkings des
supermarchés ardennais frontaliers, des coffres de voitures
de nos amis belges remplis, jusqu?à plus soif, de bouteilles
d?eau minérale? qui, d?après les témoignages recueillis,
coûtent trois fois moins cher qu?outre-Quiévrain ! La
chanson de Bruno Pia renvoie à cette ruée?
Mais, longtemps, le mouvement fut inverse, comme le montrent
les deux articles sur la contrebande en un temps où le café
et le tabac, moins chers en Belgique, étaient ramenés par
des fraudeurs et fraudeuses. La bande dessinée d?Yves
Kreztmeyer est très instructive sur ce point... Certes, sa
contrebandière emprunte le Toré mais elle aurait pu tout
aussi bien voyager avec le petit train qui allait de
Monthermé à Sorendal-Bohan, dont nous racontons l?histoire.
Une fois en France, il fallait bien boire le café et cela
nécessite quelques objets rituels ! Ce café, le dimanche,
accompagnait parfois la traditionnelle tarte au riz belge
que découvre sans modération le commissaire Maigret à Givet?
Pour rendre la pareille aux consommateurs belges, il nous a
paru aller de soi de présenter la plate de Florenville,
pomme de terre excellente. En l?achetant dès l?automne, vous
rétablirez un peu la balance commerciale belge !
Pour rester sur le thème de la frontière, mais cette fois-ci
pour la défendre, nous avons traité des durs combats de
Stonne, en 1940.
Il y a une centaine d?années, le mois de juin était marqué
par deux moments importants. Pour les « grands élèves », se
déroulait le Certificat d?études que nous évoquons, grâce à
Jean Clerc et Simon Cocu, de manière savoureuse. Pour les
adultes, c?était le moment de la fenaison qu?il faut
découvrir avec la très plaisante vidéo de chu-nous et
l?objet insolite qu?était le crapaud.
Enfin, il ne faut pas oublier d?écouter ?Vesoul?, chanson
sur les déplacements incessants et absurdes tout à la fois,
interprétée par Joël Bougeard et la superbe parodie réalisée
par ?Les Goguettes?, pendant le confinement ! C?est un peu
notre manière de vous offrir un petit bout de Fête de la
Musique 2020, qui a été bien singulière...
Jacques Lambert
Mercredi 24 juin 2020
Après 55 jours confinés, le 45e jour
de déconfinement
La double pensée du jour
J'admire comme les Belges parlent flamand en français.
Victor
Hugo
Les Belges sont de petits malins! Ils ont pris son appétit à
l'Allemand, son sérieux à l'Anglais, son esprit au Français.
Quant à moi, ils m'ont pris le c?ur !
Sacha Guitry
Commençons en chansons...
BRUNO PIA
Les grandes surfaces
_________________________________
LE BAL À JOJO
Vesoul
- Jacques Brel
____________________________
Vesoul, version du confinement !
Énormément de bonnes choses à regarder sur ce blog, en période
de confinement ou non !
Lès Moulinées
La fenaison
Travailler de
très bonne heure était indispensable. La rosée
facilitait la coupe de l'herbe ; une longue journée, dix
heures au moins, débutait. (Les faucheurs des Alleux qui
se rendaient à pied à La Cassine, distante de quinze
kilomètres environ, partaient à 2 heures du matin et
s'en revenaient vers 22 heures). « Toute la réussite
tenait enfin à une indispensable régularité, celle de la
cadence de travail. Comme on fauchait pendant plus de
dix heures par jour, il n'aurait pas été raisonnable que
le faucheur épuise ses forces, dès le début de la
matinée. Son coup de faux devait, en fin de soirée,
rester le même que celui du matin. Aussi savait-il
ménager ses haltes ». Un arrêt revenait régulièrement,
quand le faucheur donnait à sa faux un coup de pierre à
aiguiser. Cette pierre à aiguiser dont nous avons déjà
parlé se trouvait dans un coffin, biot, billon, qui
pouvait être en bois, en zinc ou simplement corne de
vache. Vers midi, quand l'herbe était sèche et cassait
inutilement les bras, on mangeait et on s'octroyait une
sieste plus ou moins longue. Le repas, comme la journée
d'ailleurs, était arrosé de cidre que l'on gardait dans
des gourdes en poterie, des
crapauds. Voici le portrait d'un faucheur de
Jandun par André Jolly ; l'anecdote est postérieure à la
guerre 1914-18 mais vaut aussi pour les années qui nous
intéressent. « J'étais gosse, et Laurent fauchait pour
mes parents un pré, pas très grand. Tout seul, cette
fois, il était en route depuis le petit jour, et quand
je suis passé près de lui en ramenant les vaches, vers 7
heures, il ne lui restait plus qu'un andain, un peu plus
d'une demi-heure de travail. - Ça va Laurent ? - Ça va,
garçon. Mais ça pourrait aller mieux tout de même. -
Qu'est-ce qui ne va pas ? - Ben, j'nai pris qu'une
cocole ce matin. Et ça fait rudement longtemps qu'y n'en
est plus question. -
C'est-y la peine d'aller t'en chercher une ? - Garçon,
c'est toujou la peine quand y s'agit d'aller qu'ri
(chercher) à boire. Oh, pas besoin d'une grande cocole.
Faut se raisonner. Mais on en boira ben une petite.
J'vas t'dire mieux, garçon. J'ai tellement soi (soif)
que j'nai jamais eu si soi. Et je n'finirai pas sans
boire. Si tu n'vas mi m'qu'ri une cocole, j'arrête.
Dix
minutes après, j'étais là avec une cocole de trois
litres. - Tu sais, Laurent, tu me l'as fait apporter,
mais faut la boire. - T'en fais pas garçon, j'aurai pas
besoin qu'on m'montre. Là-dessus Laurent a posé la faux,
il a décroché le billot et déroulé complètement la
ceinture. La grande ceinture de flanelle rouge qui
faisait six fois le tour du corps et qu'on ne quittait
jamais crainte des coliques. Puis il a choisi un fossé
un peu en remblai, et le soleil au dos, les jambes
allongées, bien calé des reins et la nuque à plat sur
l'herbe. Alors il a attrapé la cocole, il a fermé les
yeux, et en avant ! Tant qu'il y en a eu, tant qu'il a
bu. - Rrra ! garçon, qu'il a dit après, il est un peu
dur ton cidre, mais y a rien d'tel qu'un cidre un peu
dur pour ben dessoiler (rafraîchir). Ça commence à aller
mieux... Attendez, c'est pas tout. Laurent a fini son
andain en moins d'une et il a redescendu avec moi. En
passant devant la ferme : ...As-tu soif, Laurent, lui
crie ma mère, moitié pour s'foute de lui, parce qu'elle
m'avait vu emporter la cocole, moitié par politesse,
parce que c'était l'usage d'offrir un verre à un
manouvrier qu'a fini un travail. - C'est pas qu'j'ai
soi. Mais y a jamais besoin d'avoir soi pour boire un
verre. J'ai été remplir la cruche, la grande. Laurent
s'est entré. Y s'est assis, il a bu, il a causé. Puis il
a r'bu, tout en causant. Nous, manière de rire, on a
compté. Il en a r'bu quatorze verres... »
Lorsque
le pré était fauché, le travail des femmes commençait. A
l'aide de fourches à trois dents et de râteaux de bois,
elles retournaient le foin qui dégageait une odeur
agréable, elles le mettaient ?à roule? le lendemain,
puis, en petits amas, ?fanettes?, ?furiaux?, ?buirettes?,
?beurriau?, ?buriau?, ?burette?, ?bureau?, etc. selon
les patois. Pour Millet, les femmes utilisaient des
fourches à 3 ou 4 dents et des bayards (larges râteaux à
32 dents) appelés aussi diables. Lorsque le foin était
sec, on le ramassait en petites meules hémisphériques,
les ?bureaux?. Il ne restait plus qu'à charger les
lourdes charrettes ; l'homme, resté en bas, tendait au
bout de sa fourche le foin que sa femme entassait en
lits. Derrière le véhicule, la bayardeuse suivait avec
son large râteau pour faire place nette. Le convoi s'en
retournait alors ; lorsque des côtes difficiles se
présentaient, les chevaux avaient l'autorisation de
souffler un peu à partir du moment où une bûche, placée
derrière une roue, empêchait à l'équipage de redescendre
la pente. À la ferme de la Haute-Maison, le foin était
réservé pour les chevaux, lorsqu'on avait pu le rentrer
dans de bonnes conditions. Si la pluie l'avait par trop
mouillé, il était utilisé comme le regain pour les
vaches et les b?ufs, soit à l'état naturel, soit haché.
Extrait de Jacques Lambert, Campagnes et paysans
1830-1914, Éditions Terres Ardennaises, 1988, 584
pages.
Format 17 x 22
Relié, toilé sous jaquette,
586 pages plus un cahier en
quadrichromie.
43,45 ? franco
Le Certificat d?études juste
avant la Seconde Guerre mondiale
En
cette fin d?année scolaire quelque peu bouleversée
depuis la mi-mars, l?organisation des examens, en
particulier ceux du brevet des collèges et du
baccalauréat, n?a pas été facile à mettre en place, c?est le
moins qu?on puisse écrire !
Nous allons revenir, grâce aux témoignages1,
forts et émouvants, de Jean Clerc et de Simon Cocu, sur
cette institution, créée le 20 août 1886 et décédée le
28 août 1989, que fut le Certificat d?études primaires.
Ils sont illustrés par la couverture et un extrait d?un
livre de révisions, que nous avait confié un ami de
Terres Ardennaises, le regretté Denis Sauvage.
Clic sur l'image >>>>
La préparation
« Le père Compas avait donc la classe du
Certificat d?études, dans laquelle il y en avait un,
vraiment, il avait 14 ans, on ne l?avait jamais présenté
au Certificat. Et le père Compas lui promettait : Je
te garderai. Peut-être bien que cette année, on te
présentera ? Il avait donc gardé le Jean. Et un
jour, il a envoyé le Jean au tableau, alors qu?ils
faisaient une dictée d?entraînement, les autres sur leur
cahier et, lui, sur le tableau. Bien sûr, il commettait
des fautes grossières, des choses inimaginables. Il
comprend, je pense, et v'là le Jean qui, tout d?un coup,
a un coup de rébellion, un coup de sang, il dit Merde
au père Compas. Oh ! Sophocle, les grandes tragédies, ce
n?est rien à côté ! C?était impensable de dire un truc
comme cela. Lui-même était sensible au fait qu?il venait
de déclencher une catastrophe? Alors, le père Compas : Dehors,
alors que je te garde, dehors, je ne te présenterai pas
au Certificat d?études ! Rentre chez toi, je ne te veux
plus à l?école. L'autre était en larmes et, nous,
nous étions glacés. Jean sort sous les imprécations de
Compas. Il y avait comme un balcon sur la cage
d?escalier, Compas lui ?gueulait? de descendre, mais,
quand Jean est arrivé à un bon tiers de l?escalier, il
l'a rappelé : Allez, va, reviens ! Comme à la fin
des grands films sentimentaux, terrible, terrible ! Il
lui a pardonné immédiatement. Il était sans rancune. Là,
par contre, nous avons été subjugués ? nous étions des
gamins ?, nous avons été sensibles à une grandeur d?âme,
parce que vraiment? Compas ne l?a jamais présenté au
Certificat d?études, puisque c?était en 40 et que la
guerre a éclaté. (Jean).
Réussir brillamment !
« Il y avait le Certificat, que j?ai passé à 12 ans, en
1936-37. Je me rappelle que le père Dervin m?avait fait
mettre ma table tout contre son bureau et me disait :
Regarde le gros veau qui roupille. Il établissait
une connivence entre nous. Des élèves étaient parfois
mis sur la touche, car leur maître était persuadé qu'ils
échoueraient. Pour nous préparer à l'épreuve de chants
pour le certif, le directeur était incapable de chanter.
Alors, il se servait d?un phono pour qu?on puisse
apprendre les chants.
Je l'ai passé à Nouzonville, j'étais descendu en Toré.
Il y avait un mur de séparation entre garçons et filles,
mais l'examen s?est passé le même jour à la même heure.
Cela durait une journée puis les résultats étaient
donnés le soir. On savait qu?il y avait un banquet pour
les instituteurs, alors ça tardait quelquefois pour
reprendre les épreuves de l?après-midi, pour les
matières dites secondaires : récitation, chant,
gymnastique. Le père Dervin, le directeur d?école, un
entomologiste réputé, membre de la société d?histoire
naturelle connu, sentant que je pourrais décrocher la
timbale, m?a accompagné, il était là à côté de moi en
soutien quand j?ai chanté : Combien j'ai douce
souvenance?
En dessin, j?ai eu à peindre une digitale. La chanson
aussi, je me rappelle, mais, pour la dictée et le
calcul, je suis incapable de dire.
J'ai été premier du canton et j'ai reçu un livret de
Caisse d'épargne avec 20 francs, mais ceux qui venaient
derrière moi, qui étaient de Nouzon, avaient été plus
richement dotés. J?ai su après que c?étaient des prix
qu'offraient les délégués cantonaux. Or, des délégués
cantonaux étaient plus généreux que les autres, comme
le député-maire Lareppe de Nouzonville. Il régnait une
plus grande générosité à Nouzon si bien, qu'étant le
premier, j?ai pourtant eu le prix le moins élevé. Le
troisième était le fils du député-maire, Jean Lareppe,
on est restés très copains longtemps. Plus tard je me
disais, c?est pour cela que le père Dervin m?a
accompagné à l?oral, parce qu'il avait peur d'une
entourloupe. Quelle mauvaise pensée !
On aurait pu acheter une médaille pour remonter? Cela
s?achetait chez le marchand de journaux ou chez les
papetiers. C?étaient des médailles pour le Certificat
d?études. J?aurais dû en acheter une théoriquement,
repartir en train puis remonter le village en cortège,
pour montrer à la population? Je n?ai pas eu ce
privilège-là, puisque nous sommes remontés à pied. Ma
mère m?avait dit : Il se fait tard déjà, qu?est-ce
qu?on attend là ? On ne va pas attendre le petit train,
on va s?en aller à pied. De Nouzon, tout seul avec
elle, on est rentrés à pied. Alors que les autres, avec
leur médaille et tout cela, rentraient en train en
faisant les marioles. J'ai dû obéir? On m?apprenait
l?humilité. On économisait déjà deux tickets de train.
Mon père trouvait cela un peu naturel, ma réussite au
Certificat, c'était un peu normal. Il n?y avait pas à en
faire un plat. Il avait raison, parce que ce qui
comptait, c'était de nous faire continuer les études?
C?était autrement sérieux qu?une médaille ou ? Puis, ma
grand-mère m?a payé un vélo, ah ! c'était cher : plus de
500 F, une belle récompense?
Plus tard, quand j?ai passé le bac, rien, pas un mot de
félicitation, rien. J'ai passé le concours général en
mathématiques, pareil, mon père ne s'est inquiété de
rien. C?était naturel. » (Simon).
Précisions de Simon dans une autre partie du livre :
« J'ai eu un vélo pour le Certificat d?études. Mon frère
en avait eu un, donc... Je me souviens de son prix : 550
francs. C?était plus que la moitié du salaire de mon
père, mais c?est ma grand-mère qui l?avait payé. On
l?avait acheté chez un copain à mon père, un bon
ajusteur-mécanicien qui s?était mis à son compte, il
réparait les vélos et tout, il habitait à Rogissart. »
1 Jacques et Elisabeth
Lambert, Enfances de ?Vaillants?, Jean Clerc,
Henriette et Simon Cocu, Raymonde Roger,
Éditions Terres Ardennaises, 2012, 288 pages.
Se
promener avec Terres Ardennaises
Nous
étions? sur l?aire des Ardennes
(A34 Sortie 14)
Éric Sleziak, enfant de Bogny-sur-Meuse, s?est lancé il y a
plus de 30 ans dans un projet qui compte1:
« L?aventure commence le 1er janvier 1983, un
lendemain de soirée bien arrosée quand j?ai décidé de
montrer aux cons de quoi j?étais capable ! Il y en a qui
traversent l?Atlantique à la rame ! »
11 ans plus tard, « Woinic est né de l?addition des
premières syllabes de Woidouche et de Nicole, le prénom de
sa mère. » Le ?bébé? est colossal : 8,5 m de haut, 14 de
long et 5 de large, et son accouchement s?est étalé sur 11
ans, nécessitant 12 000 heures de travail ! Éric Sleziak a
utilisé « un peu plus de 50 tonnes de métal (il pèse les
morceaux avant de les assembler), 430 bobines de fil qui se
transformeront en 6,5 tonnes de soudure, 325 bouteilles de
gaz (?) ».
En 20082,
Woinic prend la route pour l?aire de Faissault/Saulces-Monclin :
le 5 août, il va de Bogny-sur-Meuse à Renwez, le 6 au soir
il est à Signy-l?Abbaye et le 7, il arrive à destination.
Pascal Chagot qui a photographié ce périple a confié :
« Pour moi, les jours précédant le 8/8/08 ont été un
événement extraordinaire auquel je n?avais jamais assisté !
Je pense qu?un tel engouement se rencontre peut-être au
passage du Tour de France, mais de manière différente. J?ai
ressenti physiquement la liesse populaire, la joie qui
animait toute une population massée le long du parcours pour
voir cette ?bête de métal?. Tant de fois apparue dans la
presse locale, elle allait dorénavant marquer de son
imposante statue une des entrées du département. »
1
Jacques Lambert, « Éric Sleziak, de Lustucru
à Woinic, ou l?histoire de deux colosses ! »,
in Bogny-sur-Meuse, Du passé à l?avenir,
livre collectif, Éditions Terres Ardennaises, 2007,
159 pages.
2
Jacques Lambert, « Woinic » in La cuisine du
sanglier des Ardennes, Françoise Thomas,
Éditions Terres Ardennaises, 2015, 131 pages.
Où sommes-nous ?
Un douanier ardennais, inventeur astucieux, Jean Victor Risse
J.-F. Beaufrère a écrit un article1
sur Jean Victor Risse, dont nous extrayons tous les
renseignements ci-dessous. Les illustrations nous ont été
confiées par son petit-fils, Jean-Claude Risse, un des
auteurs réguliers de notre revue.
Jean Victor Risse est né le 30 septembre 1868 à Stenay et il
a effectué une longue carrière dans les douanes : du 1er
janvier 1893 au 1er août 1923.
Dès le début du XXe siècle, un avocat de Rocroi,
François Cazin, constatait : « Souvent, j?ai vu la brigade
de service sortir de Rocroi pour aller se mettre en
embuscade dans les lieux les plus cachés et les plus
difficiles et par les temps les plus affreux. Leur
accoutrement consiste en une peau de mouton, des guêtres de
peau de chèvre, une longue natte de paille roulée sur un
léger chevaler qui lui sert de bois de lit. »
Vers la fin de ce siècle, la brigade d?embuscade était
composée de deux hommes : alors que l?un surveillait,
l?autre se reposait sur un lit d?embuscade, appelé aussi
?bazar?, et qui lui appartenait !
Il l?avait certainement acheté auprès de Jean Victor Risse
dont la carrière se déroula presque entièrement dans les
Ardennes, et qui, rapidement, s?était fait constructeur de
lits dont il vantait les qualités grâce à des cartes
postales publicitaires?
Jean-Claude Risse avait fourni à J.-F. Beaufrère des
précisions sur le matériel construit par son grand-père.
« [Il] faisait tourner les pieds des lits chez un tourneur
sur bois, installé place Picot, maintenant place Bozzi. Il
achetait et cousait de peaux de mouton ainsi les sacs de
toile.
Le lit est construit en petits liteaux de chêne de 2 cm par
3 de section. Les assemblages d?angle sont soigneusement
réalisés par mortaisage.
Les pieds tournés, qui semblent être la marque des lits
fabriqués par Risse, sont en bois plus tendre. Les parties
charnières sont métalliques ;
La largeur de l?ensemble est de 39 cm. La longueur totale
est de 190 cm. Le lit replié n?excède pas une longueur de 70
cm sur 30 cm de haut.
Le cordage est en chanvre. Une peau de chèvre est fixée sur
la partie haute (buste) et sur la partie médiane (assise).
Selon le témoignage recueilli, ces lits étaient à l?origine
peints de couleur mauve. »
Jacques Lambert
Nous avons publié dans les numéros 40 et 44 de Terres
Ardennaises quatorze articles sur la contrebande dans les
Ardennes, une activité ?populaire? dans un département
frontalier avec la Belgique où deux produits courants, le
tabac et le café, étaient moins chers.
À Gespunsart, Neufmanil et Nouzonville, c?était d?abord une
nécessité ? devenue au fil du temps une tradition ! ?, quand
les quinzaines des ouvriers étaient bien maigres !
Voici en intégralité l?article de Michel Tamine (n° 40) sur
le vocabulaire de la fraude qu?il a récolté à Gespunsart et
la savoureuse histoire (n° 44) de la belle contrebandière du
Toré, dessinée par le regretté Yves Kretzmeyer2.
Ces deux numéros sont encore en vente !
1 J.-F. Beaufrère, « Les lits
d?embuscade du préposé Risse », in Terres
Ardennaises, Frontières (2), n° 44,
octobre 1993.
2 Jacques Lambert, « Yves
Kretzmeyer, un compagnon de route sur les chemins de
l?Histoire ardennaise », Terres Ardennaises
n° 147, juin 2019.
Lire Michel Tamine
:
« Petit vocabulaire de
la fraude », Terres
Ardennaises n° 40, octobre 1992,
pages 22-23.
Clic sur
l'image >>>>>>
Lire Yves Kretzmeyer
:
« La belle
contrebandière et le ?TORÉ? », Terres
Ardennaises n° 44, octobre 1993,
pages 22-25.
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Le train de la Semoy
Collection Dominique Mézières
S?appuyant en partie sur le livre très
complet d?Hubert Mozaive, Les Ardennes en
PETITS TRAINS de 1865 à nos jours,
Éditions Sopaic, qui est épuisé mais qu?on
peut parfois trouver chez les bouquinistes
ardennais ou sur Internet, Wikipédia1
décrit ainsi cette ligne :
De Monthermé à Bohan, la ligne suit la rivière du côté
nord. Le 19 octobre 1901, la ligne est ouverte jusqu?à
Hautes-Rivières et le 1er mai 1914 jusqu?à
Sorendal. La liaison avec la Belgique vers Bohan n?est
ouverte qu'à partir du 17 octobre 1938. Les trains CA
n'ont jamais roulé plus loin que Sorendal. Les vicinaux
belges, de leur côté, n?ont atteint Bohan qu?à partir de
1935, après de lourds travaux : un tunnel de 220 mètres
et deux ponts. Dès le début des hostilités, le trafic
international a été interrompu et n'a jamais repris
après la guerre. Entre Bohan et Membre, les ponts et le
tunnel ont été détruits lors du retrait des Allemands et
n'ont jamais été reconstruits (22,6 km ; la partie
française a été fermée en 1950). »
Mais la personne qui s?est penchée pour Wikipedia sur les petits
chemins de fer départementaux des Ardennes a
malheureusement ignoré nos travaux?
Collection Dominique Mézières
Nous vous offrons l?article d?Agnès Paris intitulé
« TRAINS DE LA FORGE, TRAINS DE LA SEMOY » ainsi qu?un
album de huit cartes postales provenant, comme à
l?habitude, de Dominique Mézières. Une précision pour
cet album, les vues 2, 3, 4 et 5 ne sont peut-être pas
placées correctement dans l?ordre, faute de connaître
suffisamment le terrain !
« TRAINS DE LA FORGE,
TRAINS DE LA SEMOY », Terres
Ardennaises n° 19, juin 1987,
pages 18-21.
Clic sur
l'image >>>>>>
Clic sur
l'image >>>>>>
Un mot d?Ardenne : èl bèdot
Nous voici donc libérés du
confinement, et l?un des symboles de cette liberté
reconquise, c?est la réouverture des cafés, où il sera
donc à nouveau possible de boire? un café. Le mot qui
désigne la boisson est devenu tellement populaire qu?il
s?est imposé à l?établissement où on le distribue : ces
glissements de sens auxquels les grammairiens ont donné
le nom de « métonymie » sont constants en français, et
le bureau a d?abord été une étoffe (de bure), puis un
tapis de table, puis la table ou le meuble sur lequel on
écrit, puis la pièce qui contient ce meuble, puis les
personnes qui y travaillent? Quant au café, le lieu, il
est si cher au c?ur des Français que, dès 1939, le poète
Léon-Paul Fargue, déambulant dans Paris, redoute sa
disparition, dans une complainte convoquant
d?intéressants synonymes, qui, comme tous les
synonymes, n?en sont pas vraiment : « Les cafés de
Montmartre sont morts. Ils ont été remplacés par des
débits, des bars ou des grills. Je
connais pourtant un petit bistrot, un bois et
charbons, où le bonheur et le pittoresque se
conçoivent encore. » Mais le café, boisson, possède
aussi ses synonymes : le petit noir est tiré du
nom de sa couleur (comme le jaune ou le petit
jaune à l?heure de l?apéro) ; le caoua, que
les dictionnaires décrètent « argotique » ou
« populaire », a conservé la forme qu?avait le mot
lorsqu?il a été emprunté à l?arabe qahwa. À
ceux-ci, les Ardennais, qui vouent un véritable culte à
cette boisson, peuvent en ajouter un : c?est l?bèdot.
èl bèdot?
Dans sa grande enquête du début du XXe
siècle, Charles Bruneau l?avait trouvé en usage à Braux
et connu à Joigny ; et des instituteurs qu?il avait
sollicités pour compléter ses enquêtes lui avaient
indiqué son existence à Château-Regnault, à Tournavaux
et aux Hautes-Rivières.On peut glaner çà et là quelques
bribes supplémentaires : à Guignicourt, bèdot
désigne le café noir (que les Ardennais distinguent du
café blanc, dans lequel ils ont ajouté du lait) ;
mais, à Givet, le même mot s?applique à une mauvaise
boisson, et plus précisément une mauvaise bière? A.
Vauchelet ajoutait une précision intéressante parce que
localisée : « Bédot, n.m., Tasse de café (à
Nouzonville). » Ainsi formulée, la définition suggère
qu?il s?agit d?une tasse pleine de café ; mais Jean
Clerc, que ce mot, dont nous avons souvent parlé,
intriguait, lui donnait un sens un peu différent :
« Petit bol dans lequel on boit le café », et avec la
sagacité qu?il avait pour les faits de langue, il
pensait que le mot avait désigné le contenant avant de
s?appliquer au contenu, bref encore une métonymie !
Quelle peut en être l?origine ? Le grand dictionnaire de
Wartburg, qui a relevé le mot dans le tome 21, réservé
aux origines obscures ou inconnues, rappelle pour
mémoire une hypothèse fantaisiste formulée dans une page
du Petit Ardennais en mars 1927 : « Boisson chère
à la famille Bédot qui, autrefois, en faisait une grande
consommation. » Mais le simple fait que le mot puisse
désigner plusieurs boissons (café, bière ou autre)
suffit pour disqualifier l?hypothèse. En revanche,
l?observation de Jean Clerc peut nous mettre sur la voie
d?une étymologie. Bien qu?on ne trouve trace de ce sens
dans aucun document, bèdot a dû d?abord désigner
la cafetière ou un contenant susceptible d?accueillir du
café ou tout autre breuvage. Et si l?on accepte
l?hypothèse, on peut le rapprocher d?une vaste famille à
initiale bed-, bod- désignant des objets
ventrus ou gonflés et aussi divers que : boudin,
boudine (nombril), bedon (gros ventre),
bedaine, bedondaine (cornemuse à large
ventre), etc. Les cafetières anciennes présentent en
effet souvent un récipient ventru surmonté d?un cylindre
droit contenant le filtre.
?fait à la minute?
Pour rester sur le thème de la cafetière, les Ardennais
disposent d?un mot bien curieux pour la désigner, ils
l?appellent minute ; il y avait bien des façons
de confectionner le café, et le faire à la minute
était peut-être la plus fréquente. Là encore, Charles
Bruneau a recueilli le mot, à Gespunsart, Pouru-aux-Bois,
Thonne-le-Thil, et, avec quelques variantes phonétiques,
à Fumay et Fépin, mais avec le sens de « filtre en
métal », dans lequel on déposait le café moulu. Et là
encore, une métonymie a fait glisser le sens de la
partie au tout : à Givet, minute désigne à la
fois le filtre et son récipient. Partout ailleurs, à
Gespunsart, à Nouzon(ville), à La Neuville-aux-Haies,
aux Hautes-Rivières, à Guignicourt, c?est la cafetière.
Mais d?où vient donc ce mot, et quel rapport
entretient-il avec le nom que donne le français à la
soixantième partie d?une heure ? Il vient de l?adjectif
latin minutus, qui signifie « petit, menu », et
appliqué au temps (qui passe), la notion de petitesse se
traduit par celle de brièveté temporelle ; dans le
vocabulaire de la marine, une minute, c?est un
sablier qui mesure les demis et les quarts de minute. Et
tout comme la cocotte-minute cuit les aliments en un
temps record, la minute ?filtre? était censée
produire le précieux breuvage en une minute? La
minute, c?est en quelque sorte la version ardennaise
de l?expresso.
?ou au ramponeau
Parmi les mille et une façon de faire èl bèdot,
le ramponeau mérite une mention particulière :
même s?il est tombé dans l?oubli aujourd?hui, il était
partout en usage en Ardenne il y a un siècle, à tel
point que c?est quasi le seul mot recueilli par Bruneau
pour désigner le filtre à café : il était, précise-t-il,
constitué par une sorte de poche en coton à mailles très
serrées ; on y versait le café moulu, puis l?eau
chaude ; mais déjà son usage se raréfiait en raison de
la concurrence du filtre en métal, de la minute.
À Gespunsart, le ramponeau était souvent
constitué d?un vieux bas, et on l?a abandonné avant la
Première Guerre mondiale, tandis qu?à Nouzon, il faisait
l?objet d?une confection particulière et on l?a vendu
dans les épiceries jusqu?à la seconde. Curieux mot que
ce ramponeau ! Il résulte d?un autre type de
glissement, celui qui consiste à donner à un objet
devenu courant le nom de son inventeur, ou de celui qui
l?a imposé ; les grammairiens, qui veulent toujours tout
catégoriser, ont donné à ce type de glissement le nom
d?« antonomase », et l?exemple consacré pour l?illustrer
est souvent celui de poubelle, nom du préfet de
la Seine qui a rendu obligatoire l?usage de l?objet à la
fin du XIXe siècle. La langue française en
possède des centaines. Ainsi, Ramponneau était le
nom porté par un cabaretier parisien devenu célèbre vers
1760-1780, si célèbre qu?il donna naissance à une
locution : « à la Ramponneau », signifiant « à la
mode ». Sans doute confectionnait-on quantité de café
grâce à ce type de filtre chez Ramponneau. Mais pourquoi
son nom s?est-il attaché également, là encore dans des
usages populaires, au coup de poing, le seul qui soit
encore connu hors des limites des Ardennes et de la
Wallonie ? Jean Ramponneaux, personnage aussi jovial que
corpulent, fut caricaturé dans des jouets consistant
dans des figurines à large base lestée de plomb, qui se
redressaient toutes seules lorsqu?on les frappait, en
leur infligeant des ramponneaux ! Pourtant
Jean-Paul Vasset, grand amateur de mots pittoresques,
qui leur consacre une chronique hebdomadaire dans le
journal belge L?Avenir, propose une autre
explication : « On se chicorait beaucoup au café
Ramponneau. Après, la métonymie a fait le reste. Puisque
le gnon caractérisait la maison, le gnon a pris le nom
de la maison. » Bref, on navigue ici entre antonomase et
métonymie? Quel périple !
Michel Tamine
Autour du café.
Objets collectionnés
par Jean Clerc.
Photos Pascal Chagot.
Clic sur
l'image >>>>>>
La propagande allemande pendant la Première Guerre mondiale
Il fallait faire croire que la population ardennaise était
en quelque sorte satisfaite de l'occupation allemande,
qu'elle admirait les défilés militaires de l'occupant,
allant même jusqu'à pavoiser.
Prenez une loupe, la façade de la gare est rigoureusement
identique, de même que les différents groupes de personnes
au second plan. En revanche, ceux du premier plan ainsi que
le tramway ont disparu, gommés, effacés ; à leur place on a
collé une compagnie de fantassins, grossièrement, car bien
que devant le groupe de Sedanais, ils sont plus petits
qu'eux. Mais, le capitaine (provenant d'un autre collage)
fait presque figure de géant.
Gérard Blondeau
NB : le même type de cliché truqué existe avec une vue de
Raucourt.
Zoom sur l'horloge - La copie, à droite, perd en netteté mais
l'heure est la même !.
LE
VERDUN DES ARDENNES
Après avoir réussi la percée sur la Meuse puis son
exploitation en direction de la mer, le Haut
Commandement allemand veut se protéger face à une
possible contre-attaque française d?envergure qui
menacerait les arrières des Panzerdivisionen. La
crainte d?un second miracle de la Marne comme en 1914
est encore vivace dans l?esprit de nombreux généraux
allemands.
Guderian décide de consolider la tête de pont encore
précaire de Sedan en s?emparant d?une ligne de hauteurs
boisées, située à une vingtaine de kilomètres au sud.
Les troupes allemandes se heurtent alors à deux
divisions françaises, les 3e DIM et 3e
DCR, qui ont précisément reçu l?ordre de monter une
contre-attaque à partir de la trouée de Stonne et de
rejeter l?ennemi sur la Meuse.
Mais la poussée allemande prend de nouveau les Français
de vitesse et oblige le commandement à éparpiller les
blindés de la 3e DCR afin de soutenir la
défense. La contre-attaque projetée ne pourra donc avoir
lieu et les combats à venir viseront à tenir la ligne de
départ. Stonne devient rapidement l?épicentre de combats
acharnés, faisant l?objet d?attaques et de
contre-attaques répétées. Pour preuve, lors de la seule
journée du 15 mai, le village change de mains six fois,
sans qu?aucun belligérant ne parvienne à s?y maintenir
durablement.
Les combats vont connaître une intensité inconnue
jusqu?alors. Les troupes allemandes ont face à elles la
3e DIM, une division solide. Celle-ci
bénéficie de l?appui d?une artillerie particulièrement
efficace que les ländser vont apprendre à
redouter. Et les chars lourds B1Bis des 41e
et 49e BCC vont pouvoir démontrer dans le
combat rapproché leur supériorité en blindage et en
armement sur les panzers.
Le matin du 16 mai, après avoir été une nouvelle fois
rejeté de Stonne par une contre-attaque française, le
régiment Grossdeutschland quitte le secteur. Pour
cette unité d?élite, l?expérience est amère en raison de
la perte de plus de 550 hommes. Elle est relevée, ainsi
que la 10e PzD par les 16e et 24e
ID, à qui on décrit l?ennemi comme fatigué et peu
agressif. Appréciation surprenante si l?on considère
l?âpreté des combats ! Les faits vont rapidement
contredire ce jugement, comme en témoigne le commandant
de l?IR 79 : « Les Français faisaient feu sans arrêt
avec des mitrailleuses et l?artillerie. (?)
Contrairement au jugement porté par la division,
l?ennemi apparut comme très actif et vif dans ses
observations. » Et pourtant, la 3e DIM, qui
a perdu 1/5e de ses effectifs, ne peut
espérer être relevée. Elle n?est renforcée que par un
unique bataillon, et va devoir affronter deux divisions
allemandes fraîches et à plein effectif.
Les 17 et 18 mai, de nouvelles attaques allemandes sont
menées sur la totalité du front, du bois du Mont-Dieu au
Mont-Damion. Les combats sont extrêmement violents et
finissent souvent au corps à corps. Les troupes
françaises parviennent néanmoins à maintenir leur ligne
de défense, faisant même des prisonniers. Seul le
village de Stonne demeure aux mains de l?assaillant,
mais ce n?est plus qu?un champ de ruines. Dans les deux
camps, les pertes sont lourdes. Une période d?accalmie
relative va alors s?installer pendant plusieurs jours.
En 1940, Stonne n?est qu?un petit village d?une douzaine
de fermes. Depuis des siècles, l?intérêt stratégique du
site, construit en haut d?une chaîne de collines très
boisées, est connu. Non loin se dresse un promontoire,
le « Pain de Sucre », extraordinaire observatoire
naturel des alentours, dans toutes les directions et sur
des kilomètres. Dès le 16 mai, de nombreux bâtiments
sont en ruine et donnent une idée de l?intensité des
combats qui s?y sont déroulés.
Les 15 et 16 mai, les blindés de la 10e PzD
sont chargés d?appuyer les attaques de la
Grossdeutschland. Ce Panzer IV est l?un des engins
détruits par le canon antichar du sergent Durand lors de
la première attaque.
Cette photo offre une vue des épaves d?engins allemands
dans la rue principale de Stonne. Lors de la
contre-attaque du 16 mai, L?Eure, char B1Bis commandé
par le capitaine Billotte, se retrouve face à une file
serrée de panzers à l?arrêt. Un à un, le char français
va les engager et les détruire, en remontant la colonne
en sens inverse.
Visitez le site et le musée >>>>
Faits-divers, Le
Petit Ardennais du dimanche 24 juin 1900, consultable sur le site
des Archives départementales des Ardennes
Un métier disparu ou une
escroquerie du passé !
Quand la contrebande menait à la
prison
Le Petit Ardennais,
journal anticlérical militant !
AD 08 - Cote PERH44 / 41 - Le PDF du journal du jour : clic
ici
Le dessin d'Alain Sartelet
?La maison forte de Mazée, sévère mais cossue, s'éveille
lentement, un petit matin neigeux de l'an 1656. Un
profond silence feutré de blanc règne dans la cour,
tandis qu'à l'intérieur ronflent les feux des foyers...?
Texte et
dessin Alain Sartelet.
_______________
Nous avons publié
d'Alain Sartelet :
La
principauté de Sedan.
21 x 30 à l'italienne. 180 p., 1991.
Givet et
sa région à travers les siècles.
25 x 30. 180 p. en quadrichromie, 2015.
- en
coédition avec le Musée de l'Ardenne :
Mézières. Les fortifications et la citadelle.
20 x 25,5. 92 p., 2005.
La tarte au riz de Maigret chez les Flamands
En 1928, d?après
l?excellente biographie de Pierre Assouline sur Georges
Simenon1,
« il décide de mettre les voiles, au propre comme au
figuré. (?) Il acquiert une embarcation plutôt qu?une
voiture et passe son permis de capitaine-conducteur de
bateaux à moteur. C?est à Maisons-Laffitte qu?il trouve
La Ginette, un canot de 4 mètres de long pour une
largeur d?1,60 mètre, à la jauge nette de 0,80 tonneau.
Fabriquée aux chantiers De Conninck, elle lui a coûté
5 800 francs, y compris le moteur Johnson de 3 CV, la
tente qu?il y fait installer et le canot transportant le
matériel de camping, que le bateau traînera au bout d?un
filin.
(?) La
navigation a son propre langage, le vocabulaire des
mariniers et éclusiers, le seul à révéler la magie des
fleuves et l?esprit des canaux pour lesquels il ne tarde
pas à s?enthousiasmer. »
L?année
suivante, La Ginette ne lui suffit plus et il
fait construire à Fécamp « L?Ostrogoth, un cotre
taillé pour la mer (10 mètres sur 4, 20 tonneaux). (?)
Durant ces années 1929-1930, le « capitaine » Simenon et
son équipage voient du pays, de la Meuse à la Laponie
Finlandaise en passant par Liège, Maastricht, le
Limbourg belge et hollandais, Amsterdam, le Zuiderzee,
Stavoren, Delfzijl, Emden, Wilhelmshaven puis, à bord
d?un navire régulier, le cap Nord, Kirkenes? Cette
vie-là ne relève plus du tourisme, mais d?un virus : la
vie sur l?eau. Désormais, pour Simenon, il n?y a qu?une
sorte de bateau : « Celui sur lequel on vit, le
bateau-home, la maison qui flotte, le bateau qui est un
nid où, par mauvais temps, quand l?orage éclate, quand
la mer se démonte, on a sa place sèche et chaude,
intime. »
Pendant ces
longs mois durant lesquels il se déplace avec son
domicile fixe, Simenon semble s?immerger dans la
géographie humaine pour mieux fuir l?Histoire immédiate.
Il est dans une situation idéale, romantique à souhait
sur laquelle les événements n?ont pas prise à moins qu?ils
ne le rattrapent sans prévenir. »
Le 15e
Maigret2qui
se déroule à Givet : Maigret chez les Flamands3,
publié en mars 1932, est né très certainement au cours
d?une escale à la ville-frontière, même s?il a été écrit
en janvier 1932 aux Roches-Grises, Cap d?Antibes
(Alpes-Maritimes).
On peut trouver
d?excellentes raisons de relire Maigret comme les a
listées4
Gilles Heuré de Télérama. Dans Maigret chez
les Flamands, on peut relever la plus importante :
il pousse à son point ultime sa ligne de conduite qui,
la plupart du temps, le mène à ne pas juger les
assassins, en n?arrêtant pas cette fois la coupable !
Notons aussi la
description du milieu des mariniers ainsi que celle
d?une ville et d?un fleuve, sous de fortes intempéries
incessantes, qui incitent fortement, à elles seules, à
la lecture de ce roman ?ardennais?...
Enfin Maigret y
découvre, dans le premier chapitre une fameuse
spécialité belge : « Elle apportait une cafetière
fumante. Elle en remplissait trois tasses. Après une
nouvelle disparition, elle revenait avec une tarte au
riz.
(?) Et Maigret
questionnait en mangeant de la tarte épaisse.
(?) Encore un
peu de café ?? Un morceau de tarte ?... C?est Anna qui
l?a faite?
(?) Un morceau
de tarte, monsieur le commissaire ?... Non ?... Alors,
un cigare ? »
Au chapitre VII,
Maigret s?invite : « - Qu?est-ce que vous faites, demain
après-midi ?
- Comme tous les
dimanches? Nous restons en famille? Il ne manquera que
Maria?
- Vous permettez
que je vienne vous présenter mes hommages ? Peut-être y
aura-t-il de cette excellente tarte au riz ? »
Cette rencontre
dominicale est racontée au chapitre IX. Mme Peeters
« posait sur l?assiette de Maigret un grand quartier de
tarte au riz.
(?) Et Maigret,
la bouche pleine, s?adressait à Mme Peeters.
(?) Voulez-vous
me donner un morceau de tarte, mademoiselle Anna ?...
Non, pas aux fruits, je reste fidèle à votre magnifique
tarte au riz? C?est vous qui l?avez faite ?
- C?est elle ! se
hâta d?affirmer la mère. »
________________________
Dans son livre,
Le cahier de recettes de madame Maigret5,
son ami Courtine (La Reynière) propose cette recette de
tarte au riz :
« Préparer une
pâte avec 250 g de farine, 125 g de beurre, 5 g de sel
et 1 dl d?eau. Enfermer la boule de pâte dans un papier
sulfurisé et la tenir ainsi quelques heures.
Abaisser la
pâte. Et garnir une tourtière beurrée. Piquer le fond à
la fourchette.
Laver
soigneusement 180 g de riz. Le jeter dans l?eau
bouillante et le cuire 5 minutes. Égoutter.
Verser alors ce
riz dans 1 l de lait bouillant dans lequel on aura mis 1
gousse de vanille Bourbon. Cuire à feu très doux, sans
remuer, ½ heure. Ajoutez alors 100 g de sucre en poudre
et cuire encore ¼ d?heure.
Retirer la
gousse de vanille. Mélanger au riz au lait des raisins
de Corinthe macérés dans du rhum blanc et des fruits
confits hachés. Garnir la tarte de ce mélange. Cuire au
four ¼ d?heure. Poudrer de sucre et laisser refroidir. »
Courtine
précise : « Si l?on peut utiliser du lait non
pasteurisé, ce n?en sera que meilleur. Avec la tarte au
riz, Maigret boit un petit verre de genièvre. »
À défaut d?avoir
trouvé la recette de la tarte au riz de Bouillon ou de
Bohan, chère aux ?Ardennais de France?, voici celle de
Verviers :
Deux adaptations
télévisées de ce livre ont été tournées. Celle avec Jean
Richard, en 1976, dont vous pouvez lire le compte
rendu :
Clic sur
l'image >>>>>>
Celle avec Bruno
Cremer date de 1992 et n?a pas été réalisée dans les
Ardennes. Certes, le panneau routier Givet apparaît dès
le début du téléfilm, mais la silhouette des chevalets
des mines qui se profile à l?arrière-plan prouve qu?il a
été tourné en pays minier, très certainement à Douai. Et
c?est l?Escaut à Bléharies6
qui remplaça la Meuse?
En conclusion de l?article sur la corne de gatte (n° 11
du Journal de confinement), nous annoncions une
information sur une célèbre, mais trop peu connue chez
nous, pomme de terre, produite à quelques kilomètres
des Ardennes françaises : la plate de Florenville.
C?est qu?elle bénéficie, excusez du peu pour une
?patate?, depuis le début des années 2010 d?une IGP
(indication géographique protégée), reconnue par l?Union
européenne.
En effet, cette variété de Rosa est la spécialité d?une
petite région « limitée à un
terroir de sols sableux et calcaires dans la commune de Florenville et
les communes voisines1».
Elle bénéficie du label « Terra
Nostra », label
de qualité des pommes de terre wallonnes
lancé par l'APAQ-W (Agence
wallonne pour la promotion d'une agriculture de qualité)2.
Ne ratez pas, si elle est maintenue, la 21e Fête
de la plate de Florenville, le 21 octobre 20203 !
Cette préparation simple n'est
pourtant pas si facile à réussir. Il
faut, en effet, des ingrédients de
qualité, le savoir-faire et la
patience. Dans une marmite en fonte,
faire bien brunir, mais sans brûler,
des lardons, des morceaux de viande
de porc (collier et basses côtes),
ensuite des échalotes et des oignons
découpés. Ajouter des pommes de
terre « plates de Florenville »
(appelées aussi « becs »), du thym,
du laurier, un peu de sel,
du
poivre et de l'eau. On ajoute
parfois des petites saucisses
fumées. Au cours de la cuisson lente
et prolongée (+/- 2 heures, avec des
pommes de terre de qualité), les
pommes de terre vont prendre la
coloration brune des éléments de
départ. Cette préparation sera
servie en plat unique, accompagnée
d'une bonne salade vinaigrette à
base de pissenlits ou d'endive
frisée.
2. La pince à sucre : quand le sucre
était sous forme de pain ou de bloc.
La page des jeux - Solutions Jeu 2
du journal n° 14 - Sudoku -
Jean-Marie Jolly
Les photos de confinement
: Marc Stampfler (2e partie)
Nous quittons les Ardennes pour une deuxième escapade
(voir Journal de confinement n° 14 pour la première) bien
au-delà du cercle des 100 km imposé du 11 mai au 2 juin.
Marc Stampfler, qui
regrette que le Mont Ventoux ne soit pas rattaché aux
Ardennes, nous invite à découvrir la deuxième série de ses photos de balades
de confiné au pied de cette butte mythique avec des
bestioles exotiques pour nous, Ardennais.
Pour visualiser l'album (7 photos) : clic sur
l'image
L'index des journaux de
confinement - Elisabeth Lambert
Tous les thèmes abordés
dans les journaux
précédents
(numéros 1 à 14)
Clic sur l'image >>>>>
La lettre n° 79 de Terres
Ardennaises d'avril 2020