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Conception graphique et montage : Jean-Marie Jolly

Histoire(s) de pommes de terre !

     Ernest Singevin, Carolopolitain de 13 ans, écrit dans son journal de guerre à la fin 1914 : « Grâce à notre jardin, nous n?avons jusqu?ici manqué de rien, maman fait souvent des frites, comme cela on ne mange pas de mauvais pain. » Les pommes de terre sauvaient alors les consommateurs?

     En ce début de mai 2020, les médias se sont fait l?écho de l?appel de Romain Cools, secrétaire général de Belgapom, association qui regroupe les producteurs et les transformateurs de pommes de terre belges. Effrayé à l?idée de voir se perdre, à cause du coronavirus et du confinement, 750 000 tonnes de pommes de terre, il a lancé : « Mangeons tous des frites deux fois par semaine au lieu d?une seule fois ! » Ainsi, ce seront les consommateurs qui sauveront la pomme de terre?

    Nous avons décidé de ?soutenir? cet appel en mettant en avant ce précieux légume, un des fleurons de la gastronomie ardennaise, grâce aux chansons de Bruno Pia et Joël Bougeard, aux cartes postales de Dominique Mézières qui ouvrent sur une petite histoire de la pomme de terre dans les Ardennes et sur un article conséquent « autour des noms et du folklore de la pomme de terre ». Enfin, nous évoquerons la célèbre bayenne aussi facile à cuisiner que savoureuse à déguster !

    À vos cerveaux et à vos fourneaux !

 Jacques Lambert

 

Jeudi 7 mai 2020 : 52e jour

 

La pensée du jour :

« Le drame de notre temps, c'est que la bêtise se soit mise à penser »

Jean Cocteau

Hervé Chabaud l'a proposée dans son éditorial de L'Ardennais du 5 mai 2020.

   Commençons en chansons...     

 

Patates et Patois

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LE BAL À JOJO

La Cacasse à Cul Nu - Auteur Bernard Giraud

 

Énormément de bonnes choses à regarder sur ce blog, en période de confinement ou non !

Neufmanil et son patois (Lè statue)

 

   Se promener avec Terres Ardennaises
 

     Nous étions? à La Ferté

   

    Un bien modeste ouvrage que celui de La Ferté ! Deux blocs de béton reliés par une galerie souterraine et une puissance de feu réduite eu égard à la position qu?il occupe à l?extrémité ouest de la TPM : seulement six pièces antichar et une quinzaine d?armes automatiques. C?est tout. Pourtant, il occupe une place tout à fait particulière dans l?histoire de la ligne Maginot : d?autres ouvrages ont été attaqués, d?autres aussi ont été vaincus, mais celui-ci a été le théâtre d?une tragédie à la fois singulière et horrible, d?autant plus horrible qu?elle a été absurde. Pris à partie par les Allemands désireux, on l?a dit, d?élargir la brèche de Sedan ? peut-être voulaient-ils aussi s?assurer un succès de prestige tant était forte alors la réputation d?invincibilité de la ligne Maginot ? ?  il a succombé au cours de la nuit du 18 au 19 mai et aucun de ses 107 occupants n?en a réchappé, tous morts asphyxiés, à l?exception de trois d?entre eux tués par l?éclatement d?un obus.

    L?attaque des Allemands de la 71e ID du général Weisenberger a été aussi habile qu?audacieuse. Après avoir longuement pilonné l?ouvrage, notamment pour user les nerfs de ses défenseurs, tout en l?isolant de ses défenses environnantes, ils le rendent aveugle dans la soirée du 18 mai en harcelant systématiquement les cloches cuirassées qui sont ses seuls moyens propres d?observation. Dès que s?arrête le tir des pièces de 88 embusquées à Fromy, à moins de 2 km de là, et avant que les Français puissent réagir, des pionniers qui se sont infiltrés jusqu?au pied du bloc 2 et qui sont masqués par des fumigènes, bondissent sur les superstructures, détruisent à l?explosif la tourelle à éclipse bloquée en position haute ainsi que les embrasures des autres cuirassements. Puis ils jettent à l?intérieur du bloc des grenades, des explosifs et des pots fumigènes de façon à y rendre la situation intenable. Objectif atteint : vers 19 h 30, le bloc 2 est évacué, ses défenseurs se réfugiant dans la galerie souterraine.

    Le drame, c?est que personne, tant à l?intérieur de l?ouvrage qu?à l?extérieur, n?a compris ce qui vient de se passer, personne ne réalise que les Allemands sont sur les dessus ! Il faut dire aussi que le commandement français a son attention fixée sur d?autres points du secteur où la menace ennemie lui paraît plus grave et que, par conséquent, la situation de l?ouvrage n?est pas sa préoccupation majeure.

    Au cours de la nuit, les pionniers allemands en profitent donc pour se glisser sans encombre sur les dessus du bloc 1 et le neutraliser de la même façon que l?autre.

    Vers 1 h du matin, l?ouvrage de La Ferté est hors de combat. Tout son équipage est désormais regroupé dans la galerie souterraine où va commencer le dernier acte de la tragédie.

    Car, dans la galerie, l?air devient de plus en plus toxique, un courant d?air drainant vers les dessous l?oxyde de carbone dégagé par les explosions et les incendies qui ravagent l?intérieur des blocs. Depuis 23 h, les hommes portent le masque à gaz, mais les cartouches filtrantes se saturent et, bientôt, on déplore les premiers morts par asphyxie.

    Tous vont mourir ainsi, car l?autorisation d?évacuer l?ouvrage, demandée à plusieurs reprises par le lieutenant Bourguignon, lui sera à chaque fois refusée par ses supérieurs. Au petit matin, le dimanche 19 mai, La Ferté enverra un ultime message de détresse, puis ce sera le silence?

    La mort de ses défenseurs en a fait des héros. Mais qu?a-t-elle apporté de plus à la défense d?un ouvrage qui avait été préalablement mis hors de combat ?

Gérard Giuliano

 Extrait de « Sur la Chiers en mai 1940 », in Les Ardennes à fleur d?eau, Éditions Terres Ardennaises, 2010, 348 pages.

Lire aussi : Gérard Giuliano, « La tragédie de La Ferté (1) », Terres Ardennaises n° 1, décembre 1982, p. 26-30, et « La tragédie de La Ferté (2) », Terres Ardennaises n° 2, mars 1983, p. 33-37.

 

Où sommes-nous ?

 

     La pomme de terre dans les Ardennes

 

    Dans l?étude sur l?agriculture de la Semoy1 que j?ai réalisée, j?ai signalé : « Henri Manceau juge probable que le précieux légume se répandit dans l?Ardenne avant 1740. Marcelle Hugueville-Diseur [dans un article de L?Ardennais] l?appuie puisqu?elle prouve que l?on récoltait la pomme de terre dans nos pays à l?année 1733. Elle tire cette date d?un procès qui a opposé en 1781 l?un des derniers curés de Failloué, Nicolas Adam, à ses ouailles. Le pasteur avait remplacé l?abbé Renault qui, percevant la dîme sur les légumes, avait reçu, sans refuser bien entendu, une dîme volontaire et supplémentaire de la part de ses paroissiens, portant sur la pomme de terre nouvellement introduite dans le village. Mais cet accès de générosité ou ce besoin urgent de racheter quelque faute n?était pas du tout du goût de tous les villageois. Lorsque Nicolas Adam exigea de tous la perception de la dîme sur la pomme de terre, on lui fit remarquer qu?elle était insolite et, de ce fait, ne faisant l?objet d?aucun titre, n?était pas exigible. En 1781, il ne lui resta plus qu?à porter plainte contre ses paroissiens afin d?arrondir sa fortune terrestre. »

Collection Dominique Mézières.

 

    La très belle carte postale de cette éplucheuse de  pommes de terre est très certainement prise dans la Vallée de la Semoy : en témoigne l?imposant tas de fumier ? constitué en partie de genêt coupé dans la forêt ? monté haut devant la maison. L?hygiène n?y gagnait pas, par contre la richesse du cultivateur et du jardinier s?en trouvait affirmée !

     Pour Henri Manceau2, la pomme de terre était plus répandue dans le Nord du département. Dans le Rethélois, consigne-t-il, pois et grosses fèves étaient plus consommés, la région de Sedan et de Carignan était experte dans la culture du chou cabus et la vallée de l?Aisne s?était spécialisée « dans les carottes, les oignons et les grosses fèves grises comme des féveroles qui noircissaient le bouillon. »

     Cependant, cette carte postale montrant l?apprentissage de l?arrachage de la pomme de terre à Rethel atteste que ce légume, dont l?arrachage est enseigné aux futurs paysans, qui combattit victorieusement la disette et la faim était cultivé, en plus ou moins grande quantité dans toutes les Ardennes.

Collection Dominique Mézières.

     La pomme de terre était cuite de multiples façons, qui ne portaient pas toutes la même appellation !  Henri Manceau3 relève : « Dans tout le Rethélois historique, à Acy-Romance, on appelait ?croque au sel? les pommes de terre cuites sous la cendre, ?pigeons d?Ardenne? ou ?pigeonneaux d?Ardenne?, celles cuites à l?eau, ou inversement, selon les endroits. »

     Cela ne portait pas à conséquence, mais en est-il de même avec cette précision4 : « La ?potée sautée? de la Semoy, pommes de terre cuites recevant des ?quertons? de lard, était baptisée, non sans un certain mépris, ?la belgiquienne? par les gens d?Acy-Romance. » 

Jacques Lambert


1 Jacques Lambert, « L?agriculture », in Images de la Semoy avant la Grande  Guerre, Éditions Terres Ardennaises, 1992, p. 81.  

2 Henri Manceau, « Canadas, brichaudée, péquet? »,  in Terres Ardennaises Boire et manger en Ardennes, n° 16, octobre 1986.

3 Ibid.

4 Jacques Lambert, p. 82.

Lire :

    Michel Tamine, « Patate, canada, tartouffe, crombîre, Pois de terre... », in Terres Ardennaises Boire et manger en Ardennes, n° 16, octobre 1986.

Clic sur l'image >>>>>>>>>>>>    

     L?inauguration du buste de Jean-Baptiste Clément à Nouzonville

  

 

     En 2009, j?ai réalisé 24 heures d?interviews de quatre personnes, nées entre 1925 et 1930, à Neufmanil pour l?une, Simon Cocu, à Nouzonville pour les trois autres, Henriette Cocu, Raymonde Roger et Jean Clerc. Puis, avec mon épouse, Elisabeth, nous avons ordonné ces témoignages précis, saisissants, émouvants, bouleversants parfois pour restituer toute une époque, de 1925 à 1940, à travers la vie de familles ouvrières modestes et courageuses.

     De temps à autre, dans ce Journal de confinement, nous vous donnerons à lire des morceaux de ces Enfances de ?Vaillants?, qui doivent tout à ceux et celles qui nous les ont racontées !

 Jacques Lambert

Collection Dominique Mézières.

 

     «  Henriette. Il y avait du monde, quelle foule ! Je n?en revenais pas. On était descendus du côté du pont, je ne me rappelle pas avoir vu la statue. L?Internationale a été chantée. On trouvait cela naturel à l?époque.

    Pour la famille, Jean-Baptiste Clément, c?était important. Je n?ai pas vu Cachin. On chantait Le Temps des cerises, bien sûr ! C?était tout à fait naturel de faire cela et d?y aller. C?était la suite du Front populaire. C?était un événement qu?on puisse assister à une chose pareille.

    Simon. Jean-Baptiste Clément était le guide. Il était présent chez les commerçants et dans les coopératives. J?allais chercher du pain et, qu?est-ce que je voyais en entrant dans la boulangerie ? Le portrait de Jean-Baptiste Clément.

    Il y avait des portraits de Jean-Baptiste Clément dans certaines maisons particulières, mais pas chez nous.

    On habitait La Forge, sur la route de Neufmanil, et on ne pouvait pas manquer cet événement-là, d?abord parce qu?être socialiste allait de soi, puis, il y avait Maurice Voirin, donc un ami, qui participait à l?inauguration, et qui a fait un discours. Il était député. On ne pouvait pas ne pas y aller. C?était naturel.

    On s?est d?abord rendus sur la place de la mairie, où des discours ont été prononcés, dont celui de Marcel Cachin, le moustachu, Léon Troclet, qui était de nationalité belge, Lareppe, le député-maire de Nouzonville, Delattre, député de Sedan ; Viénot, je ne me souviens pas, je ne pense pas.

    La place était noire de monde. Tout ce monde-là est parti à Devant Nouzon et, nous, nous avons été stoppés à peu près au milieu du pont. Nous ne pouvions plus avancer, nous sommes restés là ; du milieu du pont, nous avions une vue quand même sur la statue, nous l?avons vue être dévoilée. Nous avons entendu La Marseillaise, L?Internationale.

    Tout le monde y était, sauf les patrons, les bourgeois. »

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    Pour entendre la première lecture de ces témoignages, lors du lancement du livre à Nouzonville (25 minutes) :

 

    Pour en savoir plus sur Maurice Voirin, député des Ardennes

Luc Voirin, « Maurice, Jean-Baptiste Voirin, député des Ardennes, maire de la ville de Mohon (28 janvier 1891-19 décembre 1980) », Terres Ardennaises n° 99, juin 2007.

Quelques mots sur la famille Voirin, Terres Ardennaises n° 99, juin 2007.

Gérard Giuliano, « Quand Maurice Voirin, exclu de la SFIO, se défendait », Terres Ardennaises n° 103,  juin 2008.

     IL Y A 80 ANS !

 

 

     Pour certains, il est des terres maudites. Soixante-dix ans après le désastre de Sedan de 1870, les Ardennes sont de nouveau au c?ur des dramatiques évènements qui vont entraîner l?effondrement de la France. On ne répétera jamais assez combien l?année 1940 reste l?un des plus grands traumatismes de l?histoire contemporaine française. Un pays et son armée, réputée la meilleure du monde, se délitent et s?écroulent dans une tourmente aussi violente que brève, en moins de six semaines.

     Or l?essentiel se joue le 14 mai à Sedan où la masse des blindés allemands parvient à percer sur la Meuse et à s?élancer aussitôt vers la Manche pour encercler les meilleures troupes françaises aventurées en Belgique. Les sacrifices et combats désespérés n?y changeront rien. La défaite est sans appel. Les Ardennes connaissent alors leur troisième occupation, au sein d?une zone dite « interdite » qui empêche le retour des réfugiés, et avec la triste particularité d?avoir été l?un des rares départements touchés par la colonisation agraire allemande.

     80 ans après ces évènements, nous vous proposons de plonger de nouveau dans les images de cette triste période qui a tant bouleversé les Ardennais(ses) !

Musée Guerre et Paix en Ardennes et  Éditions Terres Ardennaises

UN BALCON EN FORÊT

     Le 1er  septembre 1939, à 04 h 45, les troupes allemandes attaquent la Pologne. Pour les chancelleries occidentales, après de nombreuses tergiversations, le doute n?est plus permis sur les intentions belliqueuses d?Hitler. Le 3 septembre à 11 heures, la Grande-Bretagne se considère en état de guerre avec le Reich, rejointe par la France à 17 heures.

     Alors que l?opinion publique s?attend à une confrontation rapide entre les adversaires à l?image de l?été 14, aucune action d?envergure n?est tentée par les belligérants. À l?exception de la timide offensive de la Sarre du 7 au 21 septembre 1939, les Français restent à l?abri derrière la ligne Maginot. Débute alors un face à face tendu. Il va durer plus de 250 jours avant que ne se déclenchent les premiers combats. Cette longue période prendra le nom de « drôle de guerre » chez les Français. En voici quelques clichés pris dans les Ardennes

Collection musée Guerre et Paix en Ardennes.

     Loin de constituer une barrière continue, la défense dans les Ardennes repose sur différents types de blockhaus, de valeur inégale. Car ce n?est qu?à partir de la fin des années 30 que les Ardennes bénéficient d?un programme de fortification, qui prend la forme d?un semis lâche de casemates. Plus grave, les blocs construits durant la « drôle de guerre » sont pour la plupart inachevés, restés bruts de décoffrage comme on peut le constater sur ce cliché d?un bloc surplombant Donchery. Se détachant parfaitement sur le vert des prairies, la majorité d?entre eux n?a pas reçu ses cuirassements d?embrasure et constitue des cibles faciles. Ces faiblesses ne manqueront pas d?être repérées par les Allemands, s?appuyant sur l?exploitation de photos aériennes, et joueront un rôle primordial dans le choix de percer sur la Meuse.

Collection Simon Cocu.

     Les Ardennes voient affluer de nombreuses troupes durant la fin de l?année 1939. Arrivée dans le département au mois de novembre 1939, la 3e Brigade de Spahis séjourne dans la pointe de Givet du mois de décembre à avril 1940, avant d?être déployée au nord de Charleville. Cette photo d?un escadron a été prise à Chooz au cours du mois de mars 1940 à l?occasion d?un reportage effectué par la Section cinématographique de l?Armée. Elle illustre parfaitement les conditions rigoureuses que rencontre cette unité au cours de l?hiver.

     Si des Français servent dans cette unité, la majeure partie de la troupe est composée d?Algériens et de Marocains, ce qui ne manquera pas d?impressionner le jeune Simon Cocu qui rencontre ce groupe de Marocains devant Nouzonville.

Collection Jean-Claude Risse.

     À Mohon, la guerre semble être très loin et l?ambiance particulièrement détendue entre ces militaires et les civils qui les entourent. Il est vrai qu?il s?agit là d?hommes du 91e R.I., régiment composé majoritairement de conscrits ardennais, peut-être même originaires de ce village. La quiétude des photos ne doit pas faire oublier que ce sont ces mêmes hommes qui, dans peu de temps, livreront des combats meurtriers autour du village de Stonne !

 Visitez le site et le musée  >>>> 

Lire :

Il y a soixante-dix ans

dans les Ardennes,

Vendée, Deux-Sèvres

Format 21 x 30, 368 p. plus 48 en quadrichromie.

45 ?, franco de port

        Faits-divers, Le Petit Ardennais du lundi 7 mai 1900, consultable sur le site des  Archives départementales des Ardennes

 

 

Voleur insolvable ! 

Histoire :

Courage :

AD 08 - Cote PERH44 / 41 - Le PDF du journal du jour : clic ici

    Le dessin d'Alain Sartelet

 

    « Un souvenir... Sedan, hiver 1965, une journée blanche et froide, mes parents, mon petit frère et moi, le silence, la neige tourbillonne... le bonheur enfui de l'enfance, fragile comme un flocon? »

 Dessin Alain Sartelet, Ardennais confiné à Paris.

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Nous avons publié d'Alain Sartelet :

La principauté de Sedan. 21 x 30 à l'italienne. 180 p., 1991.

Givet et sa région à travers les siècles.  25 x 30. 180 p. en quadrichromie, 2015.

- en coédition avec le Musée de l'Ardenne :

Mézières. Les fortifications et la citadelle. 20 x 25,5. 92 p., 2005.

 

     Gastronomie : La bayenne

 

    Si, dans les Ardennes, il existe une Confrérie de la salade au lard et une Confrérie de la cacasse à cul nu dont les savoir-faire reposent sur la pomme de terre, nulle association de ce genre pour la bayenne

    Et c?est tout à son honneur : en effet, ce vieux plat ? absolument délicieux ? ne peut être cuit dans de grands chaudrons avant d?être vendu à de nombreux amateurs? dans des barquettes en plastique. C?est un plat essentiellement familial qui doit cuire lentement dans une bonne cocotte en fonte. Tout juste est-il cuisiné par quelques rares restaurants, en accompagnement de viande.

    Alors que la salade au lard et la cacasse à cul nu ? souvent non authentique puisque cuite avec des saucisses ? ont pignon sur rue et connaissent la célébrité, la bayenne est tombée dans l?anonymat.

 Cheminée « à l?ancienne »  chez Jean Clerc. Photo Pascal Chagot.

     Pourtant écrit Henri Manceau1 : « Les ménagères connaissaient mille façons d?accommoder démocratiquement les pommes de terre. La plus célèbre en Ardenne était « la bayenne » ou « baïne » : on cuisinait le légume dans une eau garnie d?oignons ? nos ancêtres raffolaient d?oignons ? aromatisée de vin, d?eau de vie les grands jours, et très poivrée. »

     Jean Rogissart2 renchérit : « La « bayenne » se préparait en alternant des lits de tubercule non pelés et d?oignons. Leur peau éclatait dans la marmite ? de là venait ce nom ? alors que la pulpe se parfumait de l?arôme des bulbes savoureux. »

     Monique Esquerré-Anciaux3, pour cette très rare fois, est bien légère en consignant la recette de la baïenne.  D?abord en  la présentant ainsi : « Autrefois, il n?y avait pas de cérémonie sans une bonne baïenne. Ah ! cette bonne baïenne d?Argonne, de quoi faire frémir plus d?une narine et humecter outre mesure plus d?un palais. » Or, Henri Manceau4 précise à juste titre que la culture de la pomme de terre était affaire du Nord des Ardennes et que  « le mot de ?baïne? ne nous est signalé qu?une fois près de l?Argonne, à Terron-sur-Aisne ».

     Enfin, et surtout, en répandant cette hérésie : la pomme de terre, coupée en deux dans la longueur « face coupée tournée vers le fond d?une cocote en fonte » !

 

La cocotte en fonte est indispensable? Photo Elisabeth Lambert.

     Heureusement Jean Clerc et Simon Cocu, spécialistes incontestés de la bayenne ? un plat de leur enfance ? en  rétablissent la bonne recette.

Jean Clerc5:

 « La bayine

     Est-ce un plat ou tout simplement une façon de cuire les pommes de terre ? En tout cas, une des manières les plus pauvres de cuisiner : avec de l?eau et du sel, à la croque au sel, à la croque. Nous verrons plus loin comment parfois on y ajoute quelques ornements. Pourtant c?est une façon de faire valoir tout le goût de la pomme de terre et de ne rien perdre de sa substance. Les pommes de terre non épluchées sont lavées soigneusement : on ne se prive pas de manger la plate, la peau ; et puis on les fend en deux par la longueur, en veillant à ce que la lame de couteau6 taille dans le sens où elles sont plus plates, la surface offerte en sera plus grande. Là aussi, il y a quelque rituel. On les dispose alors dans une cocotte en fonte, partie coupée en dessus, en lits successifs qui sont chacun parsemés de gros sel, assez largement. La cuisson se fait à couvercle fermé, il s?agit donc au vrai d?une cuisson à la vapeur, laquelle viendra de l?humidité propre des pommes de terre - on vient aussi de les laver. Certains, pour assurer la présence de cette vapeur mettent un rien d?eau au fond du récipient. Les points de vue différents quant à la vivacité du feu là-dessous. Dans une façon plus que lente, on pouvait mettre un torchon plié sur les pommes de terre, sous le couvercle. Quoiqu?il en soit, il faut mener l?opération jusqu?à ce que les pommes de terre soient cuites et que celles qui sont au fond y attachent et grillent.

     Ceci est la stricte orthodoxie, la pratique de base. On peut ajouter : poivre, ail ou oignon haché.

     À la saison, la bayine accompagnait les grives sur la table. Ce n?est pas la seule raison pour qu?on l?appelle ?grives d?Ardenne?. L?antiphrase fonctionnait entre le plat le plus pauvre et le plus riche.

     Dans une consommation courante, on la mangeait avec une tartine de beurre et parfois, des cornichons. On pouvait aussi l?agrémenter d?une vinaigrette. Les noms bayenne (Nouzon), bayine sont à rapprocher de l?ancien français BAIEN adjectif = crevé, en parlant de pois et de fèves. On ne dit rien d?autre à Fumay en nommant ce plat les pétées. »

 

Bayenne et boudin blanc, du raffinement dans le confinement ! Photo Elisabeth Lambert.

Simon Cocu7 :

« La bayenne

Quant à la bayenne, (bayine pour ce qui me concerne), le même journal [?Vacances en Ardenne?, 1986, édité par le Conseil général] en donne une recette où les pommes de terre sont toutes rondes ! Ce qui me surprend beaucoup. Il y a donc aussi mille ?bayines? et je dis celle que je sais : Dans une grande cocotte, disposer des pommes de terre moyennes lavées non épluchées et coupées en deux en long, la partie arrondie sur le fond de la cocotte. Saler, poivrer. Disposer une rondelle d?oignon sur chaque face coupée de pomme de terre. Si besoin est, faire un deuxième lit. Terminer la préparation en mettant l?eau qui ne doit jamais recouvrir le premier lit. On en rajoutera très peu s?il le faut en cours de cuisson, qui se fait à la vapeur, couvercle mis. On l?enlève au signal odorant du dessèchement complet du fond de la cocotte, où restent collés, comme caramélisés, les ?coutaillons? du premier lit. Ce sont ceux que l?on se dispute, car ceux du deuxième lit restent d?une pâleur moins appétissante, mais possèdent quand même cette petite peau délicieuse sur leur face coupée.

Je sais qu?il existe des baïennes à l?ail, ou au vin (comme le décrit si bien le Revinois Jean Garand) et même des coutaillons cuits avec des matières grasses.

À chacun sa baïenne comme sa salade au lard. »

Jacques Lambert


1 Henri Manceau, « Canadas, brichaudée, péquet? »,  Terres Ardennaises Boire et manger en Ardennes, n° 16, octobre 1986.

2 Jean Rogissart, « Coup d??il sur la vie populaire ardennaise 1850-1950 », in Les Ardennes, Richesses de France n° 45, juin 1960.

3 Monique Esquerré-Anciaux, Cuisine des Ardennes, Denoël, 1988, 208 pages.

4 Henri Manceau, ibid.

5 Jean Clerc, « Cuisine pauvre, pauvres nourritures. Le cochon (La Neuville-aux Haies). Les pommes de terre (Les Hauts-Buttés), Terres Ardennaises Boire et manger en Ardennes, n° 12, octobre 1985.

6 De là vient le nom de coutayon, en usage à Nouzon. Aux Hautes-Rivières, un coutayon est tout morceau, coupé, de légume ou de fruit. Le préfixe "cou" est selon BRUNEAU la forme ardennaise de "corn". C'est par conver­gence qu'il nous semblerait rencontrer cou­teau.

7 Simon Cocu, « À propos de la cuisine populaire : galette au sucre, baïenne, salade au lard », Terres Ardennaises Boire et manger en Ardennes, n° 16, octobre 1986.

       La page des jeux - Sudoku - Jean-Marie Jolly

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Solution dans le journal n° 10

 

    Sur le principe du sudoku, remplir la grille en respectant la règle habituelle :
une même lettre ne figure qu'une seule fois par colonne, une seule fois par ligne, et une seule fois par carré de neuf cases.
    Une fois complétée le nom d?une variété de pomme de terre d?origine hollandaise devrait apparaître.

     Solution de la page des jeux du n° 8 - TAQUE, OH ! TAQUE - Philippe Dupayé

14 erreurs trouvées.

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   La lettre n° 79 de Terres Ardennaises d'avril 2020

 

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