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La revue N° 100

 

 

 

N° 100 - Octobre 2007

Editorial

Notre revue fête ses 25 ans ! Nous voici donc au numéro 100. Nous avons publié notre numéro 50 en avril 1995 : il était consacré aux inondations. Sous forme de plaisanterie, nous avions signalé dans notre éditorial que La Meuse, certainement jalouse de n?avoir pas été choisie comme marraine à notre naissance !, (avait) frappé à notre porte et que cela nous avait donné le thème de ce numéro 50...  Nous avons depuis quitté le quartier d?Arches pour habiter bien plus au sec, pourtant dans une rue baptisée rue des sources !

Heureusement, pour ce numéro d?octobre qui traite d?une autre calamité : les incendies, nous n?avons pas eu à subir une expérience douloureuse, qui nous en aurait inspiré le thème. Non, c?est Pascal Chagot qui a suggéré, il y a de cela plus d?une dizaine d?années, de nous y intéresser. Le feu a longtemps couvé sous la cendre, puisque c?est seulement maintenant que nous allons parler des incendies, qui ont marqué les mémoires ardennaises, et de ceux qui les ont combattus hier et les combattent aujourd?hui.

Grâce aux précieuses archives communales, gardées par les Archives départementales, nous avons pu découvrir que, tout au long du XIXe siècle et encore durant une grande partie du XXe, l?équipement et l?entretien d?une subdivision de sapeurs-pompiers ont représenté pour les communes un effort considérable. Plusieurs articles en témoignent, avec les recours aux souscriptions volontaires, à la vente de coupes de bois, aux centimes additionnels, aux tombolas et à la chasse aux subventions étatiques ou privées, dans les communes les plus pauvres où l?achat d?une pompe en particulier représentait une dépense beaucoup trop importante pour être intégrée dans un budget ordinaire. Nous avons aussi relevé le combat entre fabricants et vendeurs locaux et leurs homologues nationaux : la lutte contre l?incendie a généré beaucoup d?argent et attisé bien des convoitises !

     Nous avons pu également dresser un portrait, à partir de règlements, de textes, de contraintes, enrichi d?anecdotes parfois savoureuses, de la manière d?être pompier dans les petits villages. D?autres témoignages plus récents ont corroboré l?idée qu?un pompier ne combattait pas uniquement les incendies, mais qu?il jouait aussi un autre rôle très important. C?était dans beaucoup de communes un élément essentiel de la vie communautaire, un créateur de lien social et parfois, pour certains villages, la subdivision de sapeurs-pompiers était la seule association active. Les sapeurs-pompiers combattaient les sinis?tres, certes, mais ils organisaient aussi les cérémonies du 14 juillet ou le bal de la fête patronale, participaient à d?autres réjouissances, distribuaient les colis des vieux pour Noël, rendaient les honneurs pour l?enterrement d?un maire?

En 2007, la départementalisation est en cours d?achèvement. Un article vous en retrace les origines, les étapes, la philosophie, mais la transition ne se fait pas sans douleur. Le but recherché est une plus grande efficacité des secours dans une société qui, en matière de sécurité, ne tolère plus les à-peu-près. Mais cette départementalisation entraîne un effacement du rôle du pompier, en tant qu?animateur de la communauté villageoise. Certains le regrettent. Les maires, moins concernés par des pompiers qui échappent à leur autorité, ne jouent plus le rôle de recruteurs qui a été le leur pendant près de deux siècles. Les adversaires de la départementalisation y voient la cause principale de la crise du volontariat dont la presse régionale se faisait l?écho le 29 juillet dernier. Les sapeurs-pompiers ardennais ont perdu près de 500 volontaires en 10?ans. En fait, les raisons sont multiples, nous n?en énumérerons que quelques-unes. Si la départementalisation, en distendant le lien entre sapeurs-pompiers et communauté villageoise en est une, on peut aussi avancer des contraintes moins bien supportées dans une société de loisirs et un temps de formation de plus en plus en plus long pour s?adapter aux exigences d?une société qui, rappelons-le, ne supporte plus l?approximation  en matière de sécurité.

Nous ne pouvons citer ici tous ceux qui, par la mise à disposition de documents communaux ou privés, ont permis la réalisation de ce numéro. Ils sont trop nombreux. Nous les remercions ainsi que les responsables actuels ou anciens responsables des pompiers du département qui ont prêté de bonne grâce leur concours à ce numéro 100.

Toute l?équipe de Terres Ardennaises et ceux et celles qui l?ont rejointe pour ce travail espèrent contribuer à une modeste échelle  ? cette expression prend tout son sens ici ! ?  à faire comprendre un corps avec ses grandeurs et ses contradictions, avec aussi ses tragédies et ses sacrifices. Un corps auquel, à juste titre, les Français sont particulièrement attachés.

Jean Diel et Jacques Lambert