Trente ans...
En juin 1982, était publié le n°
0 de notre revue ! Depuis six mois, nous fêtons cet
anniversaire : ce fut d'abord le 25 mai à Sedan la sortie de
Roger Vincent, photographe sedanais, suivie du
concert d'Yvan Dautin, puis, le 13 septembre, l'inauguration
de l'exposition Roger Vincent à la Médiathèque de Sedan,
ensuite, le 12 octobre, le lancement d'Enfances de
?Vaillants? au centre culturel de Nouzonville, le 19
octobre, un concert à Neuvizy et, enfin, nous terminons par
une exposition à la Vitrine Touristique du Conseil général
des Ardennes, place Ducale à Charleville-Mézières, visible
jusqu'au 6 janvier, et ce numéro 121.
À l'automne 1993, au cours d'une
des premières expositions de Terres Ardennaises à la Vitrine
Touristique, pour accompagner la sortie de notre numéro
Frontières (2) réalisé avec le Service des douanes
dirigé par Jean-François Beaufrère, Jacques Sourdille était
présent pour l'inauguration. Je pense que, sincèrement, il
appréciait Terres Ardennaises ? dont il achetait souvent les
numéros et certains livres ? mais, à ses yeux, notre
naissance au sein de la Fédération des ?uvres Laïques des
Ardennes nous classait indubitablement à "gauche". La
remarque que Jacques Sourdille me fit, en souriant, ne peut
s'expliquer que par cette idée qu'il se faisait de nous :
Cela vous plaît, vous qui êtes du côté des contrebandiers !
Je lui avais répondu en souriant de même : À vous
aussi, vous qui êtes du côté des douaniers ! Et nous
avions tous ri.
Partageant totalement
l'affirmation de Jean Clerc dans Enfances de ?Vaillants?
: Jamais un Nouzonnais n'aurait considéré qu'un
contrebandier était un délinquant, surtout pas, je suis
encore plus à l'aise pour tomber d'accord avec Jacques
Sourdille. Oui, à Terres Ardennaises, nous sommes quelque
part des contrebandiers, car nous ne respectons guère les
?frontières? communément établies.
Donnons quelques exemples. Nous
avons tout de suite dépassé celles qui enferment un groupe
sur lui-même : plus de 330 personnes, au minimum, ont écrit
pour Terres Ardennaises, ce qui laisse augurer d'une
diversité d'opinions, loin de la croyance ? très, trop,
tranchée ? de Jacques Sourdille. Plusieurs de nos ouvrages,
et non des moindres, sont bâtis à partir de témoignages
d'Ardennais et d'Ardennaises, devenus alors eux-mêmes ?nos?
auteurs...
Nous n'avons pas vécu dans une
tour d'ivoire mais nous nous sommes perpétuellement coltinés
avec les frontières du réel, désireux de propager nos écrits
le plus largement possible. D'où nos fêtes de Launois-sur-Vence
: ?Lire, boire et manger en Ardennes?, ?Marché de Noël et de
Saint-Nicolas?, qui n'auraient pas rencontré le succès sans
l'aide désintéressée et le soutien matériel de nombreux et
nombreuses bénévoles ; d'où notre présence assidue sur
plusieurs fêtes et manifestations ardennaises ; d'où, enfin,
ces multiples conférences données sur tout le département.
Nous n'avons établi aucune
frontière entre nous et les autres organisations. Nous
?uvrons côte à côte sur la même ligne de front, celle du
combat pour l'histoire et la géographie, ignorant les
confrontations inutilement suicidaires et recherchant
toujours les collaborations fructueuses. Plusieurs fois,
nous avons coédité des revues et des livres avec des
associations départementales, nationales et, même,
d'Allemagne ! Le pluriel de Terres Ardennaises nous a
toujours prémunis de revendiquer un quelconque pré carré !
Cette non-reconnaissance des
?frontières? n'est qu'un rappel pour les lecteurs et
lectrices qui nous connaissent ! Par contre, ils et elles
n'ont pas toujours pu s'apercevoir, qu'au sein de Terres
Ardennaises, nous n'avons jamais dressé de frontières entre
ceux qui écrivent ? peu ou beaucoup ? et ceux qui n'écrivent
pas. Le livre de l'un, l'article de l'autre deviennent le
livre, l'article de tous. Contrebandiers certes, mais jamais
de manière solitaire. S'il n'en avait pas été ainsi depuis
1982, nous ne fêterions pas nos trente ans !
Jacques Lambert