Conception
graphique et montage : Jean-Marie Jolly
Industrie ardennaise et française d?hier et d?aujourd?hui
Si la notoriété internationale de Rimbaud ? sujet de notre
jeu cette fois-ci ! ?, gentiment moquée
avec talent par Bruno Pia, ne se dément pas, celle de
l?industrie ardennaise a perdu de sa superbe après la
Première Guerre mondiale?
Trop souvent, depuis cinquante ans, la main-d??uvre ouvrière
de notre département comme celle de la France a déchanté et
pourrait, paradoxalement et amèrement, entonner Les mains
d?or, écrite par Bernard Lavilliers, interprétée avec
conviction par Joël Bougeard.
On peut légitiment craindre que les mois à venir seront bien
difficiles sur ce que les ?experts? appellent ?le front de
l?emploi?. Cette rhétorique guerrière n?est pas ?
contrairement à celle employée à l?encontre du coronavirus ?
totalement inappropriée, tant il faut parfois se battre pour
avoir un travail.
Nous racontons le temps où, à Mohon, Vrigne-aux-Bois,
Vivier-au Court, l?industrie ardennaise tournait à plein
régime et où de petites lignes départementales s?ouvraient
pour transporter les produits des usines. D?une certaine
façon et sans dévoiler où elles ont été prises, les deux
photos mystères témoignent également de ce temps faste pour
l?emploi, même si la condition ouvrière n?était pas des
meilleures?
Ne manquez pas, non plus, de lire les mésaventures advenues
à des maires ardennais pendant l?exode. Là, il n?est pas
sûr que cela ait changé : ?l?affaire? des masques qui ne
seraient pas remboursés à la municipalité de
Charleville-Mézières au prétexte qu?elle les aurait
commandés trop tôt en est la preuve?
Jacques Lambert
Mardi 26 mai 2020
Après 55 jours confinés, le 16e jour
de déconfinement
La pensée du jour
« Seuls les hommes libres peuvent négocier »
avait
répondu
Nelson Mandela,
en
1984, à Botha qui lui avait proposé la
?liberté? en échange de son silence.
Commençons en chansons...
Au pays du grand mort - Bruno Pia
_________________________________
LE BAL À JOJO
Les mains d'or - Bernard Lavilliers
Énormément de bonnes choses à regarder sur ce blog, en période
de confinement ou non !
Neuneu (El' marou...)
Se
promener avec Terres Ardennaises
Nous
étions? à Saint-Aignan
Mais, selon Marylène Thillens1,
les « ingénieurs qui se sont succédé dans l?étude du projet
de canal des Ardennes » l?appelaient « la tranchée de
Cheveuges ». Elle fut longuement discutée cependant le fait
que le « contour de la montagne de Cheveuges » entraînait un
allongement de 7 km, source de dépenses supplémentaires. Le « souterrain de Cheveuges » dont
« la longueur totale (?) tant en souterrain qu?en tranchée
avoisine 600 mètres » fut avalisé par l?ingénieur De Noël,
qui avec son collègue Du Peirat n?était pas au début
favorable à ce choix, en 1822.
Cette partie du canal deviendra ensuite « le souterrain -
dit de Saint-Aignan - ». Des travaux d?agrandissement y
seront entrepris en 1889.
La photo de Jean-Michel Benoît représente l?entrée du canal
en venant de Pont-à-Bar, celle de Pascal Chagot l?entrée
venant du Chesne.
Photo
Françoise Parizel
La photo de Françoise Parizel est prise dans le souterrain,
sens Pont-à-Bar-Le Chesne. Elle a publié une photo similaire
dans Les Ardennes à fleur d?eau2
avec cette légende : « Entrée du tunnel de Saint-Aignan. Le
souterrain est creusé dans ?une montagne?, constituée de
bancs de calcaire coquillier rougeâtre alternant avec des
couches de terre sableuse. Au pied, se trouvent des roches
de pierre tendre (calcaire oolithique). Le halage se
faisait au moyen d?une main courante en fer fixée à 1,30 m
au-dessus du niveau de l?eau, et les chevaux passaient
d?un côté à l?autre par un chemin granitique au-dessus de la
colline.»
1
Marylène Thillens, « Les grandes étapes de la
construction du Canal des ardennes », in Le Canal
des Ardennes, Société d?Études Ardennaises,
1987, 108 pages.
2 Marie-France Barbe, « Un trait
d?union entre Meuse et Aisne », in Les Ardennes à
fleur d?eau, Éditions Terres Ardennaises, 2010,
348 pages.
En vente auprès de la
SHA
Où sommes-nous ?
Michel Piccoli et les Ardennes
Jacques Morice de Télérama a titré son papier
d?hommage à Michel Piccoli : « Mort de Michel Piccoli,
un des derniers géants du cinéma français ».
Ce ?géant? ? le mot est juste ! ? est venu tourner dans
le film de René Clément : Le jour et l?heure1,
à Wasigny. Vous pouvez lire l?histoire de ce tournage
publiée dans Mémoire du Cinéma dans les Ardennes.
Je me permets simplement d?en tirer cette anecdote
rapportée par Jean Lefèvre, propriétaire de l?Auberge de
l?Abbaye, où étaient logés le réalisateur et l?acteur
américain Stuart Withman : « Michel Piccoli a donné une
grande réception et tous mes stocks de whisky ont été
épuisés? »
Collection
Dominique Mézières.
Claude
Pinoteau2,
alors assistant réalisateur, était venu en repérage et
avait trouvé que Wasigny serait un bon décor.
Tournage à Wasigny.
Document Internet.
Les deux
« stars » du film étaient Simone Signoret et Stuart
Withman, comme le montrent ces affiches. Il faut
souligner que la cinquième est tout bonnement une
?arnaque? par rapport au sujet du film : l?aide
apportée, pendant la Seconde Guerre mondiale, par une
bourgeoise parisienne à un aviateur américain qu?elle
aide à tenter de gagner l?Espagne !
N?ayant pas vu le film depuis des décennies ( !), je ne
me souviens pas exactement du rôle joué par Michel
Piccoli mais qui n?était pas principal. Comme Simone
Signoret, il avait déjà tourné dans plus de 30 films
mais il n?avait pas, à l?époque, la même notoriété
qu?elle, les choses évoluant à partir des années
soixante-dix.
Ce qui explique cette jaquette de DVD, sorti
beaucoup plus tard, qui est, elle aussi, une
?tromperie?.
Lors du centenaire de la naissance du cinéma en France
en 1995, Michel Piccoli occupa le poste de président de
l?association « Premier siècle
du cinéma
». Nous n?avions pu terminer « Mémoire du Cinéma dans
les Ardennes » pour ce centenaire mais seulement l?année
suivante. Ayant obtenu son adresse parisienne par Jérôme
Thirriot, je lui envoyai un petit mot, accompagné des
photos du tournage que j?avais retrouvées du Jour et
l?heure, lui demandant s?il acceptait de préfacer
cet ouvrage.
Format 21 x 30, couverture en couleur, pelliculée, 232 p.
dont un cahier en quadrichromie.
La
réponse ne tarda pas, courte mais courtoise et
malheureusement négative : Michel Piccoli expliquait que
l?année du centenaire du cinéma était finie. En quelque
sorte, j?avais raté l?année !
Ce
fut un grand regret, d?autant plus que j?ai égaré par la
suite la lettre? Certes, je ne suis pas collectionneur
d?autographes, cependant ! Mais l?immense plaisir de
voir jouer Michel Piccoli3
n?en a jamais été gâché. Car, comme l?écrit en
conclusion Sandrine Marques4,
en plus d?avoir joué avec les plus grands, « son
engagement politique et citoyen n?a jamais fléchi. Pour
lui, le cinéma servait à rendre compte des désordres et
des délires de notre société. Sinon, il n?avait guère
d?intérêt. Michel Piccoli en a été son intranquille
témoin, tout au long d?une carrière exceptionnelle ».
4 Sandrine
Marques, « Michel Piccoli, Comédien », Le
Monde du mercredi 20 mai 2020.
Pour rester dans le sujet principal de ce journal, Jean Gabin et Michel Piccoli, ouvriers au cinéma
En écrivant sur la présence de Michel
Piccoli pour le tournage du Jour et l?heure
à Wasigny, j?ai pensé à l?idole
cinématographique de mon père : Jean Gabin,
mais, précisait-il, celui d?avant-guerre. Une
période au cours de laquelle il a interprété
plusieurs rôles d?ouvriers : Le jour se lève,
La Belle Équipe, La Bête humaine,
pour ne citer que quelques-uns des plus connus,
inventés souvent par Jacques Prévert. La
Belle Équipe1
est, en particulier, un film « typiquement »
Front populaire, dans lequel Jean Gabin
interprète la célèbre chanson : « Quand on se
promène au bord de l?eau2 ».
Le destin de ce film, pour lequel deux fins ont
été tournées (!), et de plusieurs de ses acteurs
masculins est absolument à découvrir sur
https://fr.wikipedia.org/wiki/La_Belle_Équipe
À ma connaissance, Michel Piccoli, dont la
disparition a attristé beaucoup de spectateurs
de notre génération, n?a joué qu?un rôle
d?ouvrier extravagant dans Themroc3,
film de Claude Faraldo, sorti en mars 1973.
Jacques Mandelbaum du Monde4
écrit que c?est,
« de
fait, l?un des derniers feux cinématographiques
de l?utopie sociale en France, pour ne pas dire
son chant du cygne ». Comme Jean Gabin, Michel
Piccoli se révoltait lui aussi contre la
société, mais cette dernière ayant bien changé,
la manière de se révolter aussi.
Ces deux acteurs parmi les plus grands du cinéma
français ont eu une carrière bien différente.
Après la Seconde Guerre mondiale, au cours de
laquelle il combattit valeureusement, Jean Gabin
eut beaucoup de mal à retrouver du travail et
son statut de vedette? Il se tourna alors vers
une carrière plus sage et joua souvent, dans des
films très calibrés, des rôles ? même lorsqu?il
s?agissait de truands ? embourgeoisés. À la fin
de sa carrière, de nombreux critiques écrivent
qu?il cabotine, voire qu?il se caricature. On
rapporte qu?il refusa toujours de jouer un rôle
d?ecclésiastique pour ne pas dérouter ?son?
public.
En
revanche, la
carrière immense de Michel Piccoli est pleine de
chemins de traverse, de rôles improbables, de
films de débutants. Il joua d?ailleurs
magnifiquement, lui, un pape qui ne voulait pas
l?être dans Habemus Papam de Nino
Moretti, en 2011.
Mais, en 1970,
dans Le Chat de Pierre Granier-Deferre,
Jean Gabin interprète sobrement et
magistralement un ancien ouvrier typographe
marié à une trapéziste jadis victime d?un
accident, que transcende l?immense Simone
Signoret. Jean Gabin,
avant le démarrage du Chat,avait précisé :
« Donnez
à Madame Signoret ce qu'elle veut. Si elle ne
fait pas le film, je ne le fais pas non plus5. »
Voilà au moins
un point commun à ces deux ?géants? du cinéma
français, ils ont tourné l?un au début de sa
carrière et l?autre à la fin avec Simone
Signoret. Olivier Rajchman6
de L?Express a décrit Simone Signoret :
« Elle avait une telle présence, une telle
justesse dans le jeu qu'on ne pouvait la
comparer qu'à Gabin, observera Philippe Noiret,
précisant : les acteurs comme Simone ne
cherchent pas à vous bouffer, ils sont au-dessus
de cela. »
C?est là une parole de connaisseur,
vivant le cinéma de l?intérieur et pouvant donner son
avis sur le travail de ses partenaires ? ?ouvriers du
cinéma? ?, mais pour nous, simples spectateurs, avouons-le,
Jean Gabin, Michel Piccoli, Simone Signoret et Philippe
Noiret
sont tous de remarquables comédiens qui nous manquent.
L?atelier de paquetage à l?usine Lefort de Mohon, une carte
postale pour raconter une histoire industrielle
Collection Dominique Mézières.
Cette carte postale date de la Belle Époque, âge d?or de ce
nouveau support de communication. Parmi les innombrables
photos reproduites, il y a une part appréciable qui
représente des paysages industriels avec des composantes
symboliques fortes comme les hautes cheminées, les hauts
fourneaux, d?impressionnantes machines, mais aussi des
usines et des ateliers en activité, des groupes de
travailleurs. Sont montrés aussi des ouvriers et des
ouvrières dans leur environnement, prenant la pose ou en
train d?accomplir une tâche. La dimension sociale n?est pas
ignorée avec des photos de cités ouvrières et de châteaux
patronaux, voire de manifestations et de grèves. C?est une
façon d?exalter l?industrialisation triomphante et
d?exprimer une foi solide dans la technique comme une des
sources du progrès avec la science.
Cette carte postale montre un atelier de paquetage faisant
partie de la plus importante usine de la société Lefort
et Cie, celle de Mohon 1. Installée au
lieu-dit la Forge, sur la Vence, en aval du Moulin Leblanc,
c?est un ancien site de la Manufacture d?armes de
Charleville qui a été acheté en 1838 par un
marchand-fabricant de clous carolopolitain, Jean-Baptiste
Regnault (1788-1858). À partir du milieu des années 1880,
Mohon 1 a été spécialisée dans la production de fils de fer
destinés à la fabrication mécanique des clous, des pointes,
mais aussi de la ronce artificielle. Sous la houlette de
Jean-Baptiste Lefort (1852-1910), cette tréfilerie connaît
un essor remarquable dans le contexte difficile de la
Grande Dépression. En 1887, elle dépasse définitivement
l?usine de Saint-Marceau, qu?a créée Antoine Gaspard
Regnault (1810-1874) à la fin des années 1850, par son
volume d?activité et son nombre de salariés. À la fin du
Second Empire, cette clouterie était très réputée pour sa
spécialisation dans « la clouterie à chaud d?origine
américaine » et sa fabrication de grands clous à biseau
destinés à la construction et à la construction navale.
Depuis son entrée aux Clouteries de Mohon et Saint-Marceau en 1865, Jean-Baptiste Lefort, fils d?un
manouvrier de Vendresse, a accompli un très beau parcours
professionnel. Sa fidélité aux héritiers de la troisième
génération, Paul Regnault (1840-1914) et Léon Regnault
(1843-1908), et ses compétences remarquables sont
récompensées par sa nomination en qualité de directeur des
clouteries de Mohon (Mohon 1) en juin 1892. Par ailleurs, il
a joué un rôle efficace de conciliateur dans la lutte de
pouvoir qui a opposé les frères Regnault depuis 1884, chacun
à la tête d?un clan d?actionnaires intransigeants. En
septembre 1891, cette hostilité virulente aboutit à la
dissolution de la Société des Forges et Clouteries
réunies de Mohon et Laval-Dieu qui existait depuis 1879,
au capital social de 7 millions de francs. C?est l?échec
d?une intégration verticale vers l?amont, un mariage raté
entre les clouteries de Mohon et Saint-Marceau et les Forges
de Laval-Dieu qui devaient fournir des fers et des tôles.
Celles-ci passent dans le giron de la S.A. des Mines de
Meurthe-et-Moselle et des Usines deVillerupt.
Puis en 1913, elles seront absorbées par Senelle-Maubeuge.
Fin janvier 1893, Jean-Baptiste Lefort
est porté à la tête de la nouvelle société Lefort et Cie,
dotée d?un capital social de 3 millions de francs. Les
frères Regnault, qui détiennent prés de la moitié des
actions, lui confient la gestion des usines de Mohon 1 et
Saint-Marceau. Et, en 1905, les frères Regnault adouberont
la nomination de Léon Lefort (1878-1939), le fils de leur
fidèle collaborateur, au poste de secrétaire général.
Ingénieur, ce dernier prendra la succession de son père en
1910. Le dessein des frères de Regnault, ébranlés par leur
opposition acharnée entre 1884 et 1892, était d?assurer la
pérennité de leurs usines en choisissant un successeur de
valeur. Ils refusaient « l?introduction dans la société
d?une personne par droit de naissance » et d?entretenir «
des bouches inutiles ». L?abondante correspondance que les
trois hommes entretiennent révèle une forte proximité qui va
au-delà des échanges professionnels. Ils parlent
d?eux-mêmes, de leurs vies quotidiennes, et ne sont pas
avares de confidences, voire de quelques ragots. Dès 1903,
ils craignent le décès de leur homme idoine, s?inquiètent
aux « moindres racontars » sur sa santé qu?on leur rapporte.
Ils lui conseillent de jouer « le rôle d?un inspecteur
général qui se décharge de la besogne la plus
assujettissante sur un personnel bien stylé » (janvier
1906). La troisième génération des Lefort, André (1904-1952)
et Robert (1909-1963), verra passer progressivement la
société sous la coupe des Hauts Fourneaux de la Chiers
jusqu?à l?absorption en 1969. Une illustration de la loi
des trois générations découlant du roman de Thomas Mann, les
Buddenbrock.
Depuis sa nomination comme gérant jusqu?à son décès en 1910,
Jean-Baptiste Lefort mène une politique d?expansion. Il fait
l?acquisition de tréfileries à Marchiennes dans le Nord
(1898), de petites usines (Nouzon, Villers-Cotterêts,
Charleville, Marchiennes, Stenay), de moulins (Saint-Marcel
et Warnécourt), de la clouterie (Mohon 2) appartenant à son
cousin germain Henri Regnault (1904), en aval de Mohon 1, et
de la poudrerie de Saint-Ponce (1907) Le but de cette
stratégie étant d?éliminer toute concurrence. Dans le même
temps, il investit dans l?appareil de production en
construisant une nouvelle tréfilerie à Mohon 1 (1896), en
faisant des agrandissements et en achetant des machines, des
presses, des bobines de tréfilerie, et en faisant installer
un appareil à galvaniser. Il s?agit d?élargir la production
au-delà des clous : pointes, crampons, grillages, ronces
artificielles, fils de quincaillerie, articles de bâtiment,
et deux machine à vapeur (1895 et 1908). Afin de gagner son
indépendance envers les sidérurgistes lorrains,
Jean-Baptiste Lefort fait construire un premier four Martin
qui entre en marche à la fin du mois de novembre 1899, puis
fait installer peu après un blooming pour « laminer les gros
lingots d?acier en blocs ». En 1902, un deuxième four Martin
est édifié. Et un troisième en 1910/11. Mohon 1 est ainsi
devenue une usine intégrée dont une grande partie de la
production d?acier est dénaturée sur place en fil machine
pour la tréfilerie et en tôles pour la clouterie. Le surplus
de fils d?acier bruts est vendu.
Collection René
Colinet.
Grâce aux beaux bénéfices mis dans les fonds de réserves et
de prévoyance, les investissements ont été totalement
autofinancés. De 1893 à l?année 1912/13, 63 % des bénéfices
totaux n?ont pas été distribués, soit près de 14 millions de
francs. À Saint-Marceau spécialisée dans la fabrication des
clous, fers à b?uf, et pattes forgées, deux turbines ont été
installées pour produire de l?électricité (1894 et 1895), et
la machine-vapeur remplacée (1897) ; à Marchiennes, une
nouvelle tréfilerie est construite (1909/1910) pour
développer la production de grillages et de pointes. Paul
Regnault n?hésite pas à comparer la réussite de
Jean-Baptiste Lefort à celle de Napoléon à Austerlitz
(lettre de 1903). Sous sa houlette, le chiffre d?affaires de
la société est passé de 5 130 000 francs (1898) à plus de 9
millions de francs (1910). Et les bénéfices bruts de 581 911
francs à 1 303 603 francs. Au moment du décès de
Jean-Baptiste Lefort, la société Lefort et Ciecompte 1 641 salariés dont le salaire moyen annuel
s?élève à 1 552 francs (1 339 francs pour les ouvriers). En
1897, on ne dénombrait que 919 salariés dont 812 ouvriers,
40 employés, 67 contremaîtres et voyageurs de commerce. Il a
fait construire des cités ouvrières (1905 et 1909) pour
retenir « une main-d??uvre rare, chère, et difficile ».
Collection René
Colinet.
De 1910 à l?été 1914, Léon Lefort poursuit la politique de
son père. À Mohon 1, la Vence est détournée et de nouvelles
voies de chemin de fer sont installées dans l?usine. La
vieille tréfilerie en bois de Monthermé est remplacée,
l?usine textile Harmel à Boulzicourt est achetée juste avant
la guerre. C?est lors de l?année comptable 1912/13 que le
chiffre d?affaires atteint un niveau jamais connu
auparavant, soit 10 995 369 francs pour un bénéfice de
1 474 430 francs, et une masse salariale de 2 867 958 francs
pour 1 480 salariés. Par ailleurs, les capitaux propres
couvrent largement les immobilisations. Autrement dit, la
valeur des bâtiments, des machines, et de tout l?appareil de
production. Une situation très saine qui correspond à la
volonté de Paul Regnault de ne pas recourir à l?endettement
(garder le contrôle des actionnaires, donc de la
gouvernance) et « d?amortir (autofinancer) les
immobilisations (investissements) faites ou à faire ».
Le photographe chargé de faire la photo saisit une scène de
travail avec des femmes et des hommes absorbés par
l?objectif. Il faut préciser qu?avant 1914, le temps de pose
se compte en minutes. À hauteur d??il, on découvre un
atelier ordinaire couvert d?un toit à deux pans et éclairé
par la lumière naturelle (vitres du toit) et électrique
(ampoules à incandescence). Au premier coup d??il,
l?intérieur de cet atelier surprend par sa propreté et
l?absence de désordre. Chaque individu et chaque objet sont
à la bonne place, dans un espace de travail bien circonscrit
et bien agencé de part et d?autre d?une allée qui permet des
déplacements aisés. On peut se demander s?il ne s?agit pas
d?une mise en scène trop parfaite pour donner une bonne
image de la société Lefort et Cie, reflet
de la bonne gestion de son dirigeant, Jean-Baptiste Lefort.
Quoi qu?il en soit, cette carte postale est identique à deux
autres datant de la même époque. L?une représentant un
atelier de mise en rouleaux du fil d?acier, produit sur
place, par une main-d??uvre féminine, et l?autre un atelier
de fabrication mécanique des pointes par des adolescents. De
fait, ces trois cartes postales constituent une présentation
du processus de fabrication à la tréfilerie, de l?amont vers
l?aval. Autrement dit, de la matière première dénaturée à
l?expédition du produit fini.
Collection René
Colinet.
Revenons à la photo à l'origine de cet article qui donne une image apaisée du monde du
travail, voire aseptisée. Cela ne pouvait que plaire aux
frères Regnault, très conservateurs. Dans leurs échanges
épistolaires (1898-1910), ils dénoncent avec véhémence « les
élus (socialistes, républicains avancés) de la
canaille (ouvriers révolutionnaires, syndicalistes) », « le
combisme (anticléricalisme) », la « bien mauvaise maçonnerie
(francs-maçons qui ont soutenu Dreyfus au détriment de
l?honneur de l?Armée) », et les « anarchistes
révolutionnaires ». En 1904, ils sont dépités de l?échec aux
élections municipales, à Monthermé, de « la liste des
ouvriers honnêtes » comprenant un de leurs anciens employés,
Jacquemin, qu?ils soutenaient face aux socialistes et à leur
tête de liste Bancquart. Ils réprouvent « les lois
ouvrières » qui ne « produiront que des résultats contraires
à ceux promis » (janvier 1906), et ils s?insurgent contre
l?idée d? « un impôt progressif ou la confiscation » (mars
1905). Lors de la « grève intempestive » à Saint-Marceau en
1910, ils soutiennent Léon Lefort dans ses « idées de
résistance et de fermeté ».
On voit sur cette photo une majorité de femmes
occupées à leurs tâches de paquetage des produits finis.
Parmi les trois hommes nettement visibles, le plus ancien
pourrait être le contremaître. Chez Lefort et Cie,
la main-d??uvre féminine est très minoritaire, comme dans la
métallurgie en général, sauf la boulonnerie où il y a
davantage de femmes qui filètent les boulons et taraudent
les écrous. En 1911, les quatre usines de Lefort et Cie
emploient une main-d??uvre de 1 654 personnes dont 1 474
ouvriers, 64 employés, 49 contremaîtres et chefs d?équipe,
et 67 voyageurs de commerce. La répartition de la
main-d??uvre ouvrière se fait ainsi : 664 à Mohon 1, 313 à
Marchiennes, 242 à Saint-Marceau, 219 à Mohon 2. Parmi cette
main-d??uvre, on compte 1 086 hommes (dont 509 à Mohon 1),
98 femmes (35 à Mohon 1), et 254 enfants âgés de 12 à 18 ans
(120 à Mohon 1). Depuis la fin du XIXe siècle, le
salaire ouvrier par an a connu une augmentation appréciable
en valeur nominale : 1897 : 987 francs. 1913 : 1534 francs.
Soit un gain de 55 % mais dans une période marquée par une
accélération durable de l?inflation et la question de la «
vie chère » à partir de 1910 qui provoque des manifestations
populaires et des grèves (voir Journal de confinement n° 7,
2 mai 2020).
Cet atelier de paquetage est aussi un magasin de stockage
avec des casiers ordonnés au-dessus desquels s?élèvent des
tas de paquets en attente d?être expédiés. On les retrouve
aussi sur le côté droit. La vente des produits finis obéit
en effet à un rythme saisonnier qui oblige à avoir
d?importants stocks. On remarque une balance, au premier
plan à droite, divers outils, et l?utilisation d?échelles et
d?une brouette pour la manutention. De nombreux bacs
métalliques rectangulaires, avec des indications numérotées
sur leurs faces, s?entassent à gauche de l?allée centrale.
En l?absence d?une documentation écrite complémentaire, il
est difficile d?en définir l?usage. Au premier plan, on voit
un bac rempli de sable duquel émerge la partie supérieure
d?un objet (?). C?est bien là une limite à laquelle on se
heurte dans le décryptage d?un tel document iconographique,
plus d?un siècle après. Parmi les lecteurs du Journal de
confinement de Terres Ardennaises, y aura-t-il des personnes
capables de nous éclairer ?
René Colinet
Pour aller plus loin?
René Colinet, Métallurgie Ardennaise. Un territoire, des
usines et des hommes. ORCCA/Castor § Pollux, 2001, 156
pages.
René Colinet, « Clouteries, tréfilerie, familles patronales
des années 1830 à 1914. Des Regnault aux Lefort », in
Revue Historique Ardennaise, Tome XXXII, 1997,
p.149-263.
René Colinet, « La boutique du cloutier, ultime vestige
d?une proto-industrie disparue », in Les Mémoires de
l?Industrie en Champagne-Ardenne, dir. Gracia Dorel-Ferré,
Éd Lieux Dits, 2016, p.146-161.
René Colinet, « Le four à puddler et la machine à faire les
clous, les cheminements de deux innovations dans les
Ardennes, au XIXe siècle » in Le Patrimoine
industriel dans tous ses états, dir. Gracia Dorel-Ferré,
Éd. APIC, Université de Savoie Mont Blanc, Terres
Ardennaises, Grand Est, 2019, p.188-194.
Jacqueline Lalouette, La France de la Belle Époque,
Taillandier, 2013, 285 p.
Marie-Claude Scherrer, Gérard Vindt, « La carte postale de
1869 à nos jours », in Alternatives Économiques,
n° 260, juillet-août 2007, p.49-70.
Denis Woronoff, La France industrielle. Gens des
ateliers et des usines 1890-1950. Édition du Chêne.
2003, 294 pages.
Articles de René Colinet sur
le thème de l'industrie parus dans la revue Terres
Ardennaises :
« Un fleuron du patrimoine industriel,
le ?château? Marcadet et ses vitraux peints
à Levrézy 1 », n° 49, décembre 1994, p.
38-40.
« Un fleuron du patrimoine industriel,
le ?château? Marcadet et ses vitraux peints
à Levrézy. 2 », n° 51, juin 1995, p. 19-24.
« L?usine Bernard Huet à
Vivier-au-Court, cinq générations
d?industriels 1852-1980, 1re
partie », n° 98, mars 2007, p. 1-8. La
seconde partie, écrite par Robert Jonet, est
parue dans le n° 99 de juin 2007, p. 1-15.
Découvrez le musée en cliquant sur l'image ci-dessus.
Une vidéo de présentation
Vrigne-aux-Bois et Vivier-au-Court, les capitales de
la quincaillerie au XIXe siècle
En 2019, nous avons participé à l?ouvrage : « Le Patrimoine
industriel dans tous ses états. Un hommage à Louis
Bergeron » que nous diffusons.
Il comporte des sujets sur les Ardennes,
l?ex-Champagne-Ardenne, la région Grand Est, la France,
l?Afrique du Sud, l?Allemagne, la Belgique, le Chili,
l?Espagne, le Mexique, la Russie.
Dans la perspective d?un tourisme estival « de proximité »,
il offre des perspectives de promenades sur les traces de
l?industrie, dans les Ardennes et dans les régions proches.
Et il permet de voyager à travers le monde, tranquillement
assis chez soi.
Et, à l?automne, nous avons sorti un livre aussi étonnant
qu?agréable à lire sur ce qui fit la richesse de Vrigne-aux-Bois
et Vivier-au-Court, deux petites villes ardennaises. Nous
reprenons le début de la présentation que nous en avons fait
dans la lettre de Terres Ardennaises n° 74.
Ce
livre « nous incite à « balayer devant notre porte », plus
précisément d?ailleurs « devant nos fenêtres » ! En effet,
il s?intéresse, non pas à un patrimoine glorieux, mais,
comme le signale son auteur « au petit patrimoine, à l?art
populaire ». Il s?agit des arrêts ? dits « primitifs », à
broche et chaînette, tourniquets, loquets, verrous, en forme
de crochet, à ressort, à contrepoids, à capucine? ? qui ont
bloqué ou bloquent encore volets, contrevents et persiennes
sur les vieilles maisons ».
Voici trois cartes postales, choisies et légendées par
l?auteur, qui ne peuvent que vous inciter à lire les
quelques pages que nous avons retenues.
Vrigne-aux-Bois, la forge Gendarme Collection Marc Stampfler
Cet ensemble de
quatre halles construit en 1824 par Jean-Nicolas Gendarme
(voir Journal de confinement n° 12 du 19 mai 2020) sera
exploité par les Gendarme jusque dans les années 1876. Des
tonnes de fontes moulées y ont été coulées destinées, entre
autres à la fabrication des fers à repasser.
Il est ensuite loué à
la famille Dardenne qui y produira des articles de
quincaillerie pour le bâtiment jusqu?au milieu des années
1930 et à la Maison Creton qui y restera jusque 1969.
Aujourd?hui encore,
symbole du passé industriel de Vrigne-aux-Bois, elle marque
le paysage de la commune.
Vivier-au-Court, rue Moraimont Collection Marc Stampfler
La vie ouvrière concentrée en un cliché : les mères de
famille et les enfants à la porte de leur logement, le
lavoir et, à proximité, la « Grande Boutique » et son
extension, bâtiments imposants des Établissement
Camion-Frères où les maris et fils travaillaient.
Vivier-au-Court, Camion-Frères :
atelier des meules à eau - Collection Marc Stampfler
Ces meules servaient à polir les lames de fer à repasser.
Chacune d?elle pesait plus de 4,5 tonnes. Le travail des
ouvriers y était difficile. L?ouvrier (au premier plan à
droite), le dos appuyé sur une planche, pressait la semelle
du fer sur la meule. On peut imaginer la poussière de fer
qu?il devait respirer à longueur de journée. En 1912, la
Maison Camion-Frères sortaient des ateliers des milliers de
fer à repasser déclinés en 75 modèles.
Extrait du livre
Clic sur l'image >>>>>
Du Tremblois à la frontière belge : le tortillard de Rocroi
Actuellement, la frontière avec la Belgique est fermée.
C?est donc le bon moment pour évoquer la ligne qui, de 1895
à 1952, relia Tremblois-lès-Rocroi à Petite-Chapelle !
Collection
Dominique Mézières.
Cette carte étonnante immortalise l?arrêt du petit train en
plein centre ville, au début du XXe siècle. Dans
l?Hôtel du Commerce, les voyageurs prenaient leurs tickets.
Mais cette dérivation ne dura que jusqu?en 1905.
« Du
Tremblois à la frontière belge : Le tortillard »,
in
Terres Ardennaises
n° 14, mars 1986, pages 5-7.
clic sur l'image >>>>
Prenons le petit train avec les
cartes postales de Dominique Mézières :
Clic sur l'image >>>>>
(5 Mo)
De
quelques aspects de la situation de maires ardennais et du
préfet des Ardennes pendant l?exode
Avant l?exode, à Thin-le-Moutier
Le maire de Thin-le-Moutier a adressé au préfet des
Ardennes, le 7 septembre 1939, une question relative « aux
moyens de transport qui seront mis à sa disposition pour
répartition des voitures ».
Il dresse la liste des 315 personnes qui ne pourront
marcher : 68 vieillards de plus de 70 ans qui devront être
accompagnés, 22 vieillards valides ne nécessitant pas
d?accompagnement, 2 malades couchés, 68 enfants de 0 à 8
ans, 62 enfants de 8 à 12 ans et 93 personnes accompagnant
les infirmes, les vieillards et les enfants.
Sur les 207 personnes en état de marcher, il faut retirer 80
à 90 hommes et enfants de plus de 12 ans qui devront
conduire 202 chevaux et accompagner 1 464 bovins : 517
vaches laitières, 350 b?ufs et génisses de plus de 2 ans,
353 veaux de 1 à 2 ans, 244 veaux de moins d?un an, et 61
porcs dont 17 petits ainsi que 53 moutons et agneaux.
Il reste donc 14 hommes et enfants de plus de 12 ans et 103
femmes et fillettes.
Le maire compte que chaque réfugié emportera 40 kilos de
bagages soit un peu plus de 21 tonnes, auxquelles
s?ajouteront les 472 kilos d?archives municipales.
Le maire termine sa missive par cette question ? prière ? ?
: « Dans l?espoir qu?il vous sera possible de me renseigner
sur les moyens qu?éventuellement vous mettriez à ma
disposition, et que ces moyens seront suffisamment annoncés
à temps pour prévenir les habitants de La Fosse-à-l?eau, La
Forge Maillard, les fermes de Maizoncelle, La Vaux Gravier
et Courcelles qui sont comprises dans l?énoncé ci-dessus, ma
reconnaissance vous serait acquise. »
En février 1940, le maire écrit de
nouveau au préfet car il ne croit pas possible l?application
de la lettre-circulaire du 30 janvier 1940. En particulier à
cause « de l?indiscipline de la population à se plier en
premier lieu à la réquisition des autos que chacun considère
comme sa propriété dont il a la libre disposition pour lui
et ses proches.
J?ai déjà eu des échos de cet état d?esprit, et même avec
réquisition, s?il n?y a pas d?autorité, soit militaire soit
de gendarmerie pour en rendre l?esprit efficace, c?est en
présence de nombreuses défections que l?on se trouverait au
moment voulu, les intéressés pouvant fuir la nuit. Les
moyens locaux sur lesquels on peut compter sont donc
excessivement précaires, autant dire inexistants.
Il y a donc lieu de reconsidérer la question afin que le
Maire, le moment venu, ne se trouve pas être resté sur place
avec les vieillards et les enfants pauvres. »
Il préconise de laisser partir les propriétaires d?autos
s?ils le souhaitent et propose deux solutions :
« 1° Chauffer un train pour les laissés pour compte puisque
la voie existe toujours [Il s?agit de la ligne Mézières-Wasigny,
présentée dans le Journal de confinement 12 du 19 mai 2020].
2° Enlever les évacués et leurs bagages par camions
militaires, ce qui ne doit pas être difficile à faire au
siècle de l?automobile. »
Il précise que « la discipline du convoi [ferroviaire ou
routier, il ne le précise pas] doit être assurée par un
peloton de quelques soldats, ou par la gendarmerie, car le
paysan qui est peu discipliné le serait encore beaucoup
moins, surtout lorsqu?il est énervé comme au moment où il
abandonne tout ».
Enfin il termine par des considérations sur sa situation
personnelle : « Je pense qu?il m?aura suffi de vous avoir
signalé les points faibles du système proposé pour qu?il y
soit apporté remède, ne me sentant pas, moi Maire du pays,
apte à assurer ce repliement dans des conditions si
précaires d?autant plus que l?état déficient de ma santé,
occasionné par de fréquents accès de diabète, m?oblige à
des ménagements qu?un repliement éventuel effectué dans ces
conditions ne ferait qu?aggraver. »
Une réponse édifiante !
Après l?exode, le maire de
Laifour
Un maire démuni et des frais non
remboursables, trois documents qui parlent d?eux-mêmes !
Gérard Giuliano1
a raconté l?odyssée du préfet des Ardennes et son
installation en Vendée : « Dans la soirée du dimanche 12 mai
1940, le préfet des Ardennes, Pierre Pascal, apprenait que
les avant-gardes allemandes qui, deux jours plus tôt,
avaient franchi la frontière germano-luxembourgeoise,
étaient désormais toutes proches à Pussemange, à moins de 20
km de Mézières ! Déjà, sur ordre des autorités militaires,
le département s?était vidé d?une bonne partie de sa
population. Le préfet Pascal décida alors de partir à son
tour et, à 3 h du matin, après s?être assuré que
l?évacuation de l?agglomération carolomacérienne était
terminée, il se replia sur Rethel. La petite sous-préfecture
des bords de l?Aisne était ainsi promue au rang de
préfecture. Pour peu de temps. Asfeld prit le relais durant
quelques heures le 15 mai, puis ce fut Soissons, pendant
trois jours, et le mercredi 22 mai, dans l?après-midi, le
préfet arrivait à La Roche-sur-Yon. Son collègue vendéen lui
ayant aussitôt fait savoir que ses locaux étaient trop
petits pour accueillir deux services préfectoraux, Pascal se
replia à Ste-Hermine, un modeste chef-lieu de canton situé à
une trentaine de kilomètres de la Roche-sur-Yon, sur la
route de Fontenay-le-Comte. C?est ainsi que Ste-Hermine
devint, durant quelques semaines, la préfecture des
Ardennes. Là, les services préfectoraux se répartirent ?dans
une vieille auberge que d?aimables rencontres avaient rendu
célèbres à la ronde. Les chambres à coucher servirent de
bureaux et la salle à manger de cabinet pour le préfet. La
tenancière reprit son métier en créant un restaurant à
l?usage du personnel?. »
La mairie de Braux était aussi installée dans un hôtel !
Jacques Lambert
1 Gérard Giuliano, « Quand la
préfecture des Ardennes s?appelait
Sainte-Hermine? », Terres ardennaises n°18, marsd
1987, p. 41-50.
Faits-divers, Le
Petit Ardennais du samedi 26 mai 1900, consultable sur le site
des Archives départementales des Ardennes
Accident du travail
De très jeunes ouvriers
querelleurs
Ouvrier belge
AD 08 - Cote PERH44 / 41 - Le PDF du journal du jour : clic
ici
Le dessin d'Alain Sartelet
En ce
petit matin de décembre 1550, nous survolons le château
de Sedan, l?immense palais-forteresse sort d?une longue
et froide nuit. La grande et majestueuse fleur de lys,
au plus haut de la Grosse Tour, pointe son or vers un
ciel blanc et muet. Dans cette cité close encore, tout
s?anime peu à peu, des cuisines à la grande chambre de
Monseigneur, les domestiques s?affairent, on ranime les
feux dans les appartements. Comme un grand vaisseau de
guerre engourdi, comme pris par les glaces, revêtu de
son armure de froidure, comme une puissante caraque
figée au milieu de l?océan de l?hiver ardennais, le
château s?éveille? Dans la grande cour, la neige croque
sous les roues des carrosses. Madame la duchesse de
Bouillon a revêtu sa robe de drap d?or, les enfants
sont habillés, coiffés, beaux comme des c?urs. Le prince
a mis son habit de soie noire à boutons de diamant, les
pierres scintillent en mille échos d?un petit jour
incertain... Soudain, brisant le silence, l?angélus
sonne au clocheton poudré de neige ? il est temps, la
journée commence? tous se dirigent vers la haute
chapelle?
Texte et
dessin Alain Sartelet,Ardennais confiné à
Paris.
_______________
Nous avons publié
d'Alain Sartelet :
La
principauté de Sedan.
21 x 30 à l'italienne. 180 p., 1991.
Givet et
sa région à travers les siècles.
25 x 30. 180 p. en quadrichromie, 2015.
- en
coédition avec le Musée de l'Ardenne :
Mézières. Les fortifications et la citadelle.
20 x 25,5. 92 p., 2005.
La page des jeux -
1 - Les outils - Pascal Chagot
Devinez le nom de l'outil et son usage.
Solution
dans le journal n° 14
La page des jeux - 2 - Rimbaud
et les voyelles - Philippe Duplayé
Solution dans le journal n° 14
Trouvez
les 10 erreurs effectuées en recopiant cette
caricature du poète Arthur Rimbaud, caricature
réalisée par Manuel Luque dans le numéro 318 de la
série ?Les Hommes d?Aujourd?hui? parue chez le
célèbre éditeur Léon Vanier.
Téléchargez
les deux
dessins >>>>
et
comparez-les.
Vous pouvez colorier cette caricature du Sonnet des Voyelles en
respectant les couleurs originales.
A : noir E : Blanc I : rouge
U : vert O : bleu
Le fond bleu pâle - L?habit : bleu - Le sol : rose
Les chaussettes : rouge - Les souliers : blanc
Les ombres du fond et des lettres : gris
Les cinq pots : couleurs indiquées.
La page des jeux -
Solution du jeu du journal n° 12 - Les outils -
Pascal Chagot
Les trois
outils sont utilisés par un maréchal-ferrant.
1.
boutoir : Un boutoir est un outil métallique avec
lequel le maréchal-ferrant taille la corne superflue des
sabots pour les mettre en forme avant de les ferrer.
2.
brochoir : Le brochoir est un petit marteau
indispensable pour enfoncer les clous sans les couder.
C'est également un outil de frappe équipé d'un côté
arrache-clou très utile pour extraire un clou.
3.
ferretier : Marteau du maréchal, dont il se sert
pour forger les fers.
Solution du jeu du journal n° 12 - Histoire
d'eaux - Jean-Marie Jolly
Téléchargez la carte et la grille
avec les solutions >>>>
Remarques : Le Ton est aussi orthographié Thon.
Aubenton (Aisne) est proche de la confluence de
l'Aube et du Ton d'où son nom !
L'Artoise est notée aussi Wartoise (nom utilisée du
côté belge). C'est un sous-affluent de l?Oise.