Conception
graphique et montage : Jean-Marie Jolly
?Un journal d?histoire de proximité?
Comme annoncé, vous avez devant vos yeux le dernier Journal
de confinement de Terres Ardennaises. Il est plus que
conséquent, ?monstrueux? même aux yeux de Jean-Marie Jolly,
« metteur en pages précieux et inventif ». Mais, d?une certaine
façon, c?est un numéro spécial d?été, dans lequel l?eau et
les plaisirs divers qu?elle procure occupent une grande
place !
Plus le temps s?est écoulé, plus ce journal a grandi et plus
il nous a fallu réfréner nos envies de vous donner de
multiples pistes pour découvrir tel ou tel sujet : articles
reproduits entièrement, renvois à des extraits de vidéos, à
des albums de cartes postales ? dont la richesse sur le
point de vue historique ne nous a paru jamais aussi
éclatante : elles sont des témoignages plutôt que des photos
?, conseils de lectures de livres, pas uniquement de Terres
Ardennaises, bien évidemment.
Ces seize numéros vous ont offert de belles chansons d?ici
et d?ailleurs ? n?oubliez pas que Bruno Pia et Joël Bougeard
se produisent en concert et peuvent animer vos
manifestations ?, des dessins d?Alain Sartelet ? dont nous
publierons un livre à la fin de l?année ?, des vidéos du
très intéressant blog chu-nous et des jeux divers.
Nous remercions les lecteurs qui nous ont écrit pour dire
leur plaisir à lire ces journaux qui vont rester sur notre
site. Peut-être y trouverez-vous l?inspiration pour
rechercher, cet été ou plus tard, sur le terrain les
endroits-mystères ? Nous espérons vous avoir donné l?envie
de fréquenter les musées que nous avons évoqués : en premier
chef le très beau Musée Guerre et Paix en Ardennes qui sera
notre partenaire pour l?édition d?un livre sur l?évacuation
des Ardennes de 1940, et, dans ce numéro, de découvrir les
Ardennes au fil de l?eau.
Nous n?avons été animés d?aucune intention mercantile en
réalisant ce journal, comme nous le sommes depuis notre
création en 1982 ! Nous avons été votre « journal d?histoire
de proximité », accompagnant pour votre esprit les
producteurs locaux, qui ont été indispensables à votre
ravitaillement...
Certains d?entre eux, hier indispensables, reconnaissent
déjà, avec une pointe d?amertume, qu?ils sont moins
sollicités maintenant que le déconfinement est de règle?
leur permettant de retrouver leurs habituels fournisseurs :
les supermarchés !
Pour notre part, nous espérons que vous nous resterez
fidèles en achetant nos revues, par abonnement ou au numéro,
et nos livres, directement chez nous ou dans les librairies
et maisons de la presse, Car, sans ces revues et ces livres,
il n?y aurait jamais eu ces journaux !
Jacques Lambert
Mardi 14 juillet 2020
Après 55 jours confinés, le 65e jour
de déconfinement
La pensée du jour
Sensation
Par les soirs bleus d'été, j'irai dans les sentiers,
Picoté par les blés, fouler l'herbe menue :
Rêveur, j'en sentirai la fraîcheur à mes pieds.
Je laisserai le vent baigner ma tête nue.
Je
ne parlerai pas, je ne penserai rien :
Mais l'amour infini me montera dans l'âme,
Et j'irai loin, bien loin, comme un bohémien,
Par la Nature, - heureux comme avec une femme.
Arthur Rimbaud
Commençons en chansons...
BRUNO PIA
Les mangeux d?terre
_________________________________
LE BAL À JOJO
La complainte de la butte
écrite par Jean Renoir pour les paroles et Georges van Parys
pour la musique.
Une complainte plus agréable que celle de Gaston Couté,
ci-dessous.
____________________________
GÉRARD PIERRON
En 2007, Terres
Ardennaises a fêté ses 25 ans à Nouzonville. Inviter le
Cercle Pierre Bayle à interpréter sa pièce,
Clément-des-Cerises, sur Jean-Baptiste Clément dans la ville
où il est honoré (lire Journaux de confinement n° 8 et n° 9)
allait de soi? Y associer un concert de Gérard Pierron1
et de son équipe, interprétant des chansons d?un
poète scandaleusement méconnu, Gaston Couté2,
nous avait permis de réunir deux poètes que beaucoup de
points rassemblent.
La chanson ?
toujours d?actualité ! ? reprise par Bruno Pia dans un
cadre des plus appropriés : une grange à Évigny, Les
mangeux d?terre, m?a incité à me repencher sur l?univers
de Couté et d?y sélectionner quelques superbes et émouvantes
chansons renvoyant à des thèmes que nous avons traités :
La guerre de 1870 : Les conscrits et Les ramasseux
d?morts.
Le patois : Le patois de chez nous.
Le vin : La dernière bouteille.
Nous y ajoutons
deux chansons sur les grands-parents d?hier en pensant à
ceux d?aujourd?hui dont la pire épreuve du confinement a
été de ne pas voir leurs petits-enfants : Sur un air de
reproche et Grand-mère Gâteau.
Pour télécharger le texte
clic sur l'image >>>>>
Acheter un des
disques de Gérard Pierron interprétant Gaston Couté ne vous
décevra pas, c?est sûr?
Et pour soutenir
cet artiste, qui
doit se battre pour continuer à chanter, ne pas hésiter à
souscrire à son prochain disque : "Good Bye Gagarine".
Énormément de bonnes choses à regarder sur ce blog, en période
de confinement ou non !
Les Grands-ducs du
château de SEDAN
Les Ardennes en bateau, loué à Pont-à-Bar !
En descendant le fleuve
près des Dames de Meuse.
Photo
Elisabeth Lambert.
Pour soutenir la tendance de cet été 2020, quelque peu
insolite, qui consiste à prendre ses vacances à
proximité de son domicile, nous vous signalons une
manière plus qu?originale de découvrir son ?Pays? : la
navigation fluviale.
D?autant que les Ardennes ont la chance de posséder une
base de location de bateaux sans permis à Pont-à-Bar,
fréquentée par des touristes européens voire venus
d?horizons très lointains !
https://www.pontabarnautisme.fr/
Si le canal des Ardennes, sur lequel
nous reviendrons longuement dans le numéro d?octobre de
Terres Ardennaises, est fermé pour une durée que
nous espérons toujours la plus courte possible, il est
possible de descendre la Meuse pour y admirer les
beautés naturelles comme les Dames de Meuse ou la
remonter en direction de l?Alsace.
Si Jacques Dutronc s?interroge :
« L?aventure est-elle au coin de la rue ? », nous
affirmons, nous : « L?aventure est au coin du canal, de
la rivière ou du fleuve ! »
Une preuve de cette assertion est l?article que nous
mettons en ligne, « avec l?aimable autorisation du
mensuel Fluvial, [il] fait partie des milliers
d?articles sur les voies d?eau que vous pouvez consulter
dans les archives du magazine (www.fluvialnet.com)
».
Pour lire l'article :
Clic sur
l'image >>>>>>>>>
En remontant le fleuve, un arrêt obligatoire dans le
très joli port de Mouzon, d?où l?on peut gagner en
quelques minutes l?abbatiale de Mouzon. Collection
?Mouzon, vue d'avion en 2006?, photo fournie
par Guy Cochard.
Il faut noter que le même auteur, Jean-François Macaigne,
a publié dans le même excellent magazine (n° 299 de
février 2020), une étude alléchante sur un voyage,
effectué cette fois-ci vers la Belgique.
Les Ardennes à fleur d?eau : Pour découvrir
notre département en naviguant, ou en
roulant ou en cheminant le long des eaux
ardennaises.
Une évocation détaillée et chaleureuse de
l?univers de la batellerie, qui appartient
dorénavant au passé.
Se
promener avec Terres Ardennaises
Nous
étions?au Point de Sedan
Gérard Gayot, spécialiste de
l?histoire du drap sedanais1,
a écrit que « les Ardennes de la laine et du drap, des
mécaniques à tisser et à filer, ont bien existé, formant à
côté des Ardennes du fer un des ?pays? des Ardennes, un pays
vivant, où on a travaillé dur et vécu durement mais où, au
moins, on travaillait et on aimait à rester. Un ?pays?
textile unique en son genre : les usines aujourd?hui
désertes, les maisons de fabrique de Sedan, le Dijonval, les
châteaux de Bazeilles et de Montvillers, sont autant de
témoins ouvriers, techniques et patronaux d?une des plus
étranges et des plus formidables aventures de
?l?industrialisme? saint-simonien ; là, l?État créa, en
effet, en 1646, la première ?entreprise publique?
d?industrie drapière de France, la Manufacture Royale de
draps fins de Sedan. De ce passé prestigieux, le Point de
Sedan est un bon et beau témoin. Il est fragile, et il
faut le défendre pour qu?il soit un heureux présage, comme
il faut encourager toutes les initiatives prises en faveur
d?un développement harmonieux. Ne serait-ce que pour faire
cesser la rumeur de catastrophe qui, dans le langage commun,
persiste autour du nom de Sedan2 ».
Malheureusement, la « fragilité » du
Point de Sedan a entraîné sa cessation d?activité le 6
octobre 2008 et les projets muséographiques autour du
bâtiment et des machines qu?il contient n?ont, pour
l?instant, pas abouti.
Pour mieux connaître l?histoire du
Point de Sedan :
1 Gérard Gayot, Les draps de
Sedan 1646-1870, Éditions de l?École des Hautes
Études en Sciences Sociales et Éditions Terres
Ardennaises, 1998, 574 pages.
2 Gérard Gayot, « Mémoire de
l?industrie du drap. », in Les Ardennes aux
quatre vents, Éditions Terres Ardennaises, 1992,
319 pages.
Où sommes-nous ?
Réponse : voir fin du journal
Le 14 juillet à Charleville et à
Mézières, d'après Le Petit Ardennais
Le programme de la retraite aux flambeaux du 14 juillet est
rendu public le 7. De nombreuses musiques participeront,
dont les tambours et clairons du 91e et la
fanfare du 40e. Un détachement du 91e l?accompagnera, la marche sera ouverte et fermée par des
canonniers à cheval.
Le rendez-vous est fixé au Petit-Bois à 19 h 45, des arrêts
sont prévus : place Ducale, place de la République où les
sociétés macériennes remplaceront les carolopolitaines,
place d?Armes, rue du Faubourg-de-Pierre puis arrêt au
kiosque ; place Saint-Louis, arrêt et dislocation. À chaque
arrêt, les musiciens jouent un morceau, mais place d?Armes,
le 91e exécutera aussi La Marseillaise.
Les villes de Mézières et de Charleville, après la demande
du chef de musique du 91e, fourniront chacune la
moitié de l?éclairage nécessaire aux musiciens du 91e
et aux militaires porteurs de torches.
L?édition du 11 revient sur ce programme. À Charleville, une
« distribution extraordinaire aux indigents (indépendamment
des secours habituels » et celle d?une tarte aux cerises,
dans la matinée du 14 juillet, aux familles nombreuses sont
annoncées, comme à Mézières, la « distribution
extraordinaire d?aliments aux indigents inscrits au Bureau
de Bienfaisance », le lundi 13.
La journée du 14 à Charleville se déroulera ainsi : 9 h :
cours d?Orléans, revue des troupes de la garnison passée par
le général, commandant de la division ; 10 h 30 : lâcher de
pigeons voyageurs place Ducale, par la Fédération
colombophile de Charleville, et audition musicale de
l?Harmonie municipale ; 14 h 30-15 h 30, concerts au square
de la Gare, dans l?ordre suivant : Chorale municipale,
Harmonie municipale, Chorale Cheviste ; 20 h 30, grand bal
de nuit place Ducale.
À
Mézières, après le Grand prix cycliste, la partie musicale
sera assurée par la fanfare de 14 à 15 h, puis, au square
Mialaret, la musique du 91e exécutera un
programme de circonstance : La Marseillaise (Rouget de Lisle),
Soldat d?Alsace (F. Sali), Le roi l?a dit, ouverture (L.
Delibes), La Houzarde, valse (L. Ganne), Marche tricolore (Popy),
Dis-moi ! Quel est ton pays ? (Sellenick). L?Union du
Commerce Macérien offrira à 16 h 30, place Saint-Louis, un
feu d?artifice japonais.
Des bals sont organisés le dimanche 12, le soir des courses
hippiques à Charleville, et le 14, square Mialaret, dès 20 h
30, de brillantes illuminations et un grand orchestre
réjouiront les danseurs. Il n?est pas indiqué de bal à
Charleville le 14, est-ce un oubli ?
Les maires demandent à leurs concitoyens de « pavoiser et
d?illuminer les façades de leurs maisons ». Les
établissements publics bénéficient d?horaires spéciaux : à
Charleville, le 12, jusqu?à 2 h du matin, le 13 jusqu?à
minuit et le 14 toute la nuit ; à Mézières, le 13 jusqu?à
minuit et toute la nuit du 14.
Le maire de Charleville interdit les voitures dans certaines
rues, les pétards, fusées et, surtout, les autres pièces
d?artifice en ville sont « expressément défendues ».
Le 16, le journal se réjouit : « L?impression produite par
notre beau régiment a été excellente. On sentait des hommes
entraînés, très assouplis, défilant aisément sous les armes
et chargés de leur équipement. Ce régiment représente bien
nos troupes de couverture prêtes à partir au premier signal.
Au pas et aux sons de leur fanfare, passent les artilleurs,
leurs pièces bien alignées et les dragons de Villers dont
les casques brillent d?un vif éclat au soleil. »
Ce n?est pas du tout l?avis de Mme Doquin, qui a vu, malgré
le ciel clair et le soleil, dans cette cérémonie « quelque
chose d?assez terne ». Elle note qu?il y a eu peu de
drapeaux et beaucoup moins de monde qu?habituellement à la
retraite aux flambeaux. Si les défilés du 91e et
des batteries du 61e d?artillerie ont été salués
avec « émotion », le retour au Merbion effectué sans «
tambours ni clairons » a fait s?exclamer son voisin : « Ne
trouvez-vous pas que nos soldats ont l?air de revenir d?un
enterrement ? »
Jacques Lambert
Extrait de Jacques Lambert et Reinhold Weitz, L?année
1914 à Charleville, Mézières et Euskirchen, Éditions
Terres Ardennaises, 2014, 336 pages.
Les cartes postales de Dominique Mézières n?ont pas été
prises le 14 juillet 1914, mais, sans aucun doute, elles
auraient pu l?être. La dernière, qui a été prise un jour de
revue, aussi !
Le mouvement ouvrier et le 14 juillet
Lire Didier Bigorgne :
«
Le mouvement ouvrier et le 14 juillet »,
Terres Ardennaises n° 27, juin 1989,
pages 33-36.
Clic sur
l'image >>>>>>
Haulmé sur la Semoy en 1936, une plage ardennaise !
Une des victoires des grèves de mai-juin 19361
a été l?instauration de 15 jours de congés payés. Cette
mesure, comme le montre Catherine Poncelet,
n?a pas entraîné une forte émigration vers les
plages du pays.
Lire Catherine Poncelet
«
Les Ardennais et les premiers congés payés »,
Terres Ardennaises n° 15, juin 1986,
page 29.
et Simon Cocu
« Le billet populaire de congé annuel »,
Terres Ardennaises n° 15, juin 1986,
page 30.
Clic sur
l'image >>>>>>
Mais il est vrai que les Ardennais et Ardennaises
avaient les bords de la Semoy pour profiter d?une
liberté encore inespérée au début de l?année.
1er rang, de droite à gauche, Henriette, tout à
droite, 3e en maillot noir, sa s?ur Suzanne. Leur
mère, ?Man Cécile?, est derrière elles, en robe.
Cette fois, Henriette est debout, tout à gauche, et Suzanne
est au 1er rang, au centre.
Voici trois témoignages savoureux et pleins de vie, ceux
de Raymonde Roger, d?Henriette Cocu et de Jean Clerc,
tirés d?Enfances de ?Vaillants?2,
qui retracent cette aventure à 10 km de leurs maisons !
Raymonde.
« Une fois, Papa nous a emmenés sur la Semoy. On s?y est
rendus à pied, de Nouzonville à Haulmé. Il fallait
descendre une côte, oh là là, pas facile ! Moi, je ne me
suis pas baignée, j?ai juste trempé mes pieds, l?eau
était drôlement froide. On ne s?en rendait compte qu?une
fois dedans, seulement. Les autres enfants se sont
baignés sans maillot de bain. Papa et Maman ne se sont
pas baignés non plus. De toute façon, Papa n?aimait pas
l?eau froide.
On était avec un couple espagnol et leurs enfants. Ils
avaient perdu un fils. Tout le monde riait quand
l?Espagnole allait dans l?eau, parce qu?elle portait un
grand jupon qui gonflait dans l?eau comme un champignon.
C?était d?autant plus rigolo qu?elle riait avec tout le
monde, avec les jeunes gens. Elle était heureuse et elle
criait son nom. C?était la seule fois qu?on est allés à
la Semoy. »
Henriette.
« Pendant les congés payés, pour les parents, c?était
vraiment quelque chose. On faisait des balades, on
partait le matin, on emportait des casse-croûte. La
grand-mère ne venait jamais, elle restait toujours toute
seule.
On prenait le train jusqu?à Levrézy puis, on allait à
travers bois et on débarquait au-dessus d?Haulmé. On
allait à la plage à Haulmé, où on passait la journée. On
avait amené le casse-croûte. L?eau de la Semoy était
froide. Filles et garçons se baignaient en même temps,
ensemble. Il y avait des bandes de copains, surtout des
gens qui travaillaient chez Calteaux, la Gina... On
partait en groupe et on rentrait le soir. Le soir, je ne
sais plus si on prenait le train.
On n?y a été que deux ans, surtout que la seconde année,
je n?ai même pas pu profiter de mon beau maillot de
bain, pour une fois que j?en possédais un beau ! Parce
qu?il a fallu que je le prête à une Parisienne, qui
était en vacances avec nous. Elle était en vacances chez
son oncle et sa tante. Notre famille était copine avec
eux. »
Jean.
« Les mêmes ouvriers de l?usine ont pris aussi
l?habitude d?aller à la baignade à Haulmé. On prenait le
train jusqu?à Levrézy puis, de la gare de Levrézy, on
revenait sur nos pas jusqu?au pont de Braux, on passait
sous la voûte, on prenait un chemin pentu qui nous
amenait en haut de la côte, on n?avait plus qu?à
redescendre et on était à Haulmé. Il fallait grimper
mais cela ne faisait rien, car nous étions légers. On
amenait le casse-croûte, on cassait la croûte sur la
prairie et on se ?bagna?.
Cela se passait pendant les congés, dans la semaine, on
ressentait vraiment le bonheur des vacances. C?était
merveilleux ! Ce n?était pas du tout aménagé. On se
baignait près du barrage, l?eau était un peu plus haute.
Mais il commençait à y venir du monde, des Brautins
venaient, tout ça?
Les maillots de bain des hommes étaient avec un haut
mais sans manches. Ils étaient coupés comme on dit
maintenant, comme un marcel. Les jeunes disaient qu?ils
mettaient un caleçon de bain. Les filles se baignaient
aussi. Ma mère ne s?est jamais baignée, elle ne s?est
jamais mise en maillot de bain. Je ne suis pas sûr qu?il
y ait eu une femme du groupe qui se soit baignée. Je ne
vois que les hommes. La plupart ne savait pas nager !
Mon père se baignait, sans savoir nager.
Souvenir merveilleux ! J?ai failli me noyer, mais
enfin ! J?avais piqué du nez dans la flotte et je ne
savais pas nager ! Il y en a un qui m?a attrapé comme
ça. C?était là, le problème avec le patois ! Quand ils
m?ont repêché : Ah, le Jean il ?éta couqui?. Et
je ne sais plus, il y avait quelqu?un qui n?était pas
patoisant à qui il a fallu donner des explications. Ils
ont eu un plaisir extrême à manier le mot ?couqui?.
C?est là qu?on voit que c?était vraiment leur langue.
On se mettait quelque chose sur la peau pour la
protéger, ce n?était pas encore la mode du bronzage. Le
désir d?être bronzé n?existait pas encore. »
Jean est assis sur les genoux
d?une baigneuse, son père est au dernier rang, légèrement
penché vers l?avant, sa mère est devant lui, un peu à sa
droite alors que Josette, sa s?ur est tout à droite de la
photo...
**************
S?il ne raconte pas d?escapade sur
la Semoy, Simon Cocu revient sur les baignades de son
enfance : « Nous nous baignions à la Goutelle,
où nous possédions un endroit attitré qui avait été
aménagé par des jeunes gens. Les flancs du ruisseau
étaient un peu évasés, creusés, et les gazons qui
avaient été enlevés sur les berges servaient à établir
des barrages. Cela donnait une ?goffe?circulaire, de
plusieurs mètres de diamètre, assez profonde ? gamin, je
la voyais comme ça puisque l?eau m?arrivait jusqu?au
cou. On y passait des heures entières. Les hommes, comme
mon père, nous rejoignaient après journée faite. Mon
père me prenait sur son dos, montait sur un mur,
plongeait et, moi, je m?accrochais. Je me cramponnais à
son cou, j?étais léger. On portait des maillots de bain,
à la papa, avec des bretelles. Mon père arrivait en
caleçon, qui lui servait de maillot de bain. On ne
s?achetait pas de maillots de bain. Cela se faisait tout
l?été, cela s?appelait ?la grille?, il régnait une bonne
ambiance. Les femmes ne venaient pas, non, non. J?ai
appris à nager là, tout seul.
Mais tous les gamins savaient nager, il coulait un cours
d?eau, hop ! Sauf ceux qui avaient la phobie de l?eau,
mais c?était rare. Après 37, on se baignait à la Meuse.
On se baignait comme cela, ce n?étaient pas des bains
organisés, c?était au gué d?Ardennes. Quelqu?un
prétendait qu?il y avait un morceau de voie romaine qui
passait. Là, nous savions, qu?à certains endroits dans
la Meuse, nous avions pied sur une espèce de dalle, mais
je ne crois pas à cette histoire de voie romaine.
C?était à peu près à l?endroit de la déchetterie
actuelle. Il y avait deux endroits à Nouzon, en dehors
du pont, le gué d?Ardennes et la prairie Barbette. »
2 Jacques et Elisabeth
Lambert, Enfances de ?Vaillants?, Jean Clerc,
Henriette et Simon Cocu, Raymonde Roger,
Éditions Terres Ardennaises, 2012, 288 pages.
Rethel-bains
François Guérin en a raconté l?histoiredansle journal
Escapades,
n° 113, paru en juillet-août 2005 :
« C?est le 3 juin 1936 lors d?une réunion à l?hôtel de
ville de Rethel que se forme un comité ? Président Paul
Cailleteau, entouré d?un bureau composé de Fernand
Pouply, Jean Ledoux, Pierre Verdun, Henri Chambron et
Paul Nicolas ? pour l?établissement d?une baignade au
bord de l?Aisne dans le but d?y créer une école de
natation et de sauvetage. Le projet d?exécution comporte
un petit bain pour les enfants, un grand bain pour les
adultes et l?installation de cabines, vestiaires et
sautoirs. Pour fiancer les travaux, les entrées sont
payantes et une cotisation annuelle est fixée avec la
possibilité d?acheter une carte familiale. La location
d?un terrain situé en face de la baignade permet d?y
installer des jeux pour enfants, d?établir une buvette
et ainsi à la belle saison organiser des fêtes et jeux
nautiques. Une barque réunissait les deux rives, comme
il est rapporté dans le n° 24 du Bulletin du musée du
Rethélois et du Porcien.
En 1941, la baignade est interdite suite aux nombreux
dégâts et risques consécutifs à la bataille de Rethel.
Le 24 août 1942, le conseil municipal décide d?acheter
les installations de Rethel-bains pour la somme de
20 000 francs. Le 14 juin 1950, après remise en état des
structures, la baignade est ouverte tous les jours de 16
à 20 heures. Une grande fête de nuit avec fontaines
lumineuses est organisée pour marquer cette renaissance.
Un arrêté de 1957 stipule au nom de la protection de la
santé publique, en raison des travaux de recalibrage de
l?Aisne et la vétusté des installations, l?interdiction
de se baigner. L?association de natation créée en 1966
pousse la municipalité à remettre en état la baignade
l?année suivante avec notamment la construction de
nouvelles cabines et la réfection du Bassin.
Bain de
Rethel. Collection François Guérin.
Il faut attendre janvier 1977 pour l?ouverture de la
piscine ?Tournesol?. Le site au bord de l?Aisne va
progressivement tomber à l?abandon. L?endroit envahi par
les herbes va être nettoyé en 1993 par l?école
?Gambetta? dans le cadre d?un projet d?école. »
Autres
bains
Les bains de Villers-Semeuse
Les bains de Villers-Semeuse ont été longtemps un des
endroits des Ardennes les plus courus l?été.
Lire Jérémy Dupuy :
«
Un exemple de sport ouvrier dans les Ardennes : les
?Bains? de Semeuse », Terres Ardennaises n°
94, juin 2005,
pages 1-5.
Clic sur
l'image >>>>>>
Quelques cartes
postales de bains
Clic sur
l'image >>>>>>
Vivent les
colos !
L?enfance Ouvrière Ardennaise.
Cette photo a été prise lors d?un séjour dans la
dernière colonie ardennaise encore en activité : Île
Grande, gérée par l?Enfance Ouvrière Ardennaise.
Présidée par Philippe Pailla, elle fonctionne cette
année, avec bien entendu les précautions imposées par la
situation actuelle. Renseignements : 03 24 57 56 61.
Pour connaître l?histoire de cette colonie, créée par
Mme Viénot, il vous faudra acheter le livre que nous
avons publié pendant le confinement. Eh oui ! On ne peut
pas tout vous offrir?
Pour en savoir plus :
Clic sur
l'image >>>>>>
En revanche, vous avez accès à la présentation de la
colonie qui fut la plus importante des Ardennes : celle
de Quiberon.
Lire Jean-Pierre Pénisson :
«
La Cité des Jeunes Ardennais à
Saint-Pierre-Quiberon », Terres Ardennaises n°
113, décembre 2010,
pages 6-22.
Clic sur
l'image >>>>>>
Le
chemin de fer de la banlieue de Reims (C.B.R.)
Un train dans la
ville ! Cette carte comme toutes les autres sont de
Dominique Mézières.
Nous terminons cette évocation des petits chemins de fer
départementaux par la ligne, envisagée dès 1895, qui a
joint Rethel et Soissons. Cela se fit en deux temps : la
portion entre Rethel et Neufchâtel-sur-Aisne fut
inaugurée le 25 octobre 1903 et, l?année suivante,
Soissons fut atteint.
Lire Robert Marcy
«
La ligne d'intérêt local de Soissons à Rethel du
Chemin de fer de la Banlieue de Reims (C.B.R.) », Terres Ardennaises n°
13, décembre 1985,
pages 1-4.
Clic sur
l'image >>>>>>
Quelques cartes
postales de la ligne du C.B.R.
Clic sur
l'image >>>>>>
La beuquette, mythe et réalité
Chez A. Vauchelet1,
la beuquette n?existe pas. En revanche, il parle
de la baunette : trou ou lucarne par où on peut
voir sans être vu, et il cite comme synonymes :
bauquette, beugnette, baurette,
baute, bounette, bauette, boouette,
goulette.
Le mot est suivi par bauquer : regarder en
cachette par une bauquette. Synonymes :
beuquer, bauner, bâquer, abauter.
Il en est de même chez Désiré Huart2,
qui donne les définitions suivantes : « Bauquer,
v.. Regarder en cachette. Lè vî femm? bauquan par drî
zeu rideaux = les vieilles femmes regardent en
cachette derrière leurs rideaux. Bauquett?, n. f.
Lucarne. I rwêto pa la bauquett? = il regardait par la
lucarne. »
Michel Tamine3
consigne beuquette, n.f., Voir : bauquette.
Il définit ainsi ce mot : « ?il de b?uf, lucarne,
?illeton de porte. D?une façon plus générale, endroit
d?où l?on bauque. Dérivé du verbe Bauquer.
Sobriquet : La Bauquette. Variante : BEUQUETTE. Certains
patois possèdent beuquet, ?il d?un n?ud coulant.
Il présente ainsi bauquer : « Regarder
furtivement en écartant le rideau de la fenêtre ; épier.
Suppose une curiosité malsaine, ou une intention
malveillante. De battucare, dérivé ancien du
verbe latin batare (être ouvert).
René Chauvin4
ne connaît pas bauquette mais beuquer et
ses dérivés.
« Beuquer v.i. Regarder par une petite
ouverture sans être vu. - J?vauraus bin savoi qu?est-ce
et c?toû-là, avet sa tchien qui vint faire det
salop?ries su l?pas d?porte. - Tu n?es qu?à beuquer
à la p?tite lucarne, t?arriv?rais bin pa sawoi qu?est-ce
quet c?est.
Beuquet n. m. N?ud coulant. - Hé René,
faut-ti quej fais det harts pou loyie let fagots ? - Si
tu ve, mais fais det biaux beuquets, pou n?mi ête
embêté pou passer l?bout.
Beuquette n. f. Petite ouverture, lucarne par où on peut
voir sans âtre vu. - Nénesse ! Toutes let pouilles
sont-ti rentrées ? N?y a n?n?et pus qu?une ! - Fais-la
rentrer et pis tu froum?rais la beuquette. »
Robert Cecconello avait écrit dans Terres Ardennaises5
sur l?édition de La beuquette-Chronique des Ardennes
1996-19976 :
« Il n?est pas très aisé de rendre compte de La
beuquette, recueil de chroniques et de billets
d?humeur, car on se sent davantage sous le regard des
lecteurs que sous celui de l?auteur. En effet, qui ne
lit pas La beuquette quotidienne du journal
L?Ardennais ? Celui-ci la lit du bout des cils, et
les soucis froncés, cherche la formule assassine qui
vouera l?auteur aux gémonies ; celui-là, au contraire,
se régale et ne se prive pas de le faire savoir. En
atteste l?important courrier reçu par Yanny Hureaux, et
faut-il que ce dernier jouisse, malgré ses ennuis de
santé, d?une vitalité exceptionnelle pour faire face aux
assauts ou aux louanges de ses lecteurs !
Pour ma part, je retiens de ce recueil le plaisir des
mots, des ?poèmes?, d?un amoureux de l?Ardenne, parfois
choquant, grinçant, ironique, parfois désenchanté,
désabusé, mélancolique. Surtout, j?y ai lu les mots d?un
homme qui, comme l?écrit Yanny Hureaux, a des ?rides sur
la peau de l?âme? ».
Jean Clerc, dans l?article auquel nous renvoyons,
lorsqu?il analyse la formule rituelle finale : yauque
nèm était plus sobre : « Yanny Hureaux a son nèm,
selon le contenu du billet, nous demande de nous
étonner, de nous indigner, d?adhérer à ses idées,
d?admirer dans le même élan que lui. » Mais surtout, il
s?élève avec un humour implacable contre le fait que la
beuquette, oculus qui éclairait la pierre
d?évier, titre de la chronique de Yanny Hureaux, soit
présentée comme une lucarne par laquelle les ménagères
surveillaient la rue?
Encore très récemment, Simon Cocu m?assurait qu?il
partageait entièrement le point de vue de son vieil ami
Jean. Par contre, je n?ai jamais demandé à ce fils de
Neufmanil ce qu?il pense du petit billet, inséré dans
son article, de Jean sur Les Torés, sobriquet
dont sont affublés les gens de Gespunsart.
Pour une fois, Jean, d?habitude si courtois, avait fait
preuve d?une ironie mordante !
Jacques Lambert
1 A. Vauchelet,
Tous les
patois des Ardennes Vieux langages et Vieilles
Choses, Réédition décembre 1979, Écrivains
ardennais, 251 pagers. La première version est
sortie le 25 mars 1940.
2 Désiré Huart, LES PATOIS DE
L?EST-SEDANAIS en particulier des cantons de
MOUZON-CARIGNAN et quelques villages limitrophes
de la Meuse et de Belgique, Édition à compte
d?auteur, 1988, 202 pages.
3 Michel Tamine,
Le parler
des Ardennes, Christine Bonneton Éditeur,
avril 2006, 191 pages.
«
Une beuquette c'est yauque nem », Terres Ardennaises n°
69, décembre 1999,
pages 1-5.
Clic sur
l'image >>>>>>
La
beuquette du 1er étage de la vieille
école d?Évigny : une beuquette pour waitie
(regarder) les anges ? Photo Elisabeth Lambert
Trois
beuquettes en enfilade à Poix-Terron pour suivre à
la trace le passant ou la passante ? Plutôt trois
ouvertures, afin de les éclairer, au-dessus des pierres
d?évier de trois petites maisons accolées. Photo
Elisabeth Lambert
Tagnon,
un « drôle » de camp de vacances en juillet 1940 !
Grâce à trois exceptionnelles photos, collectées par
Michel Pion, dont les deux dernières sont, sauf erreur
de notre part, inédites, nous pouvons découvrir un des
deux camps ? le second était implanté à Maison-Rouge,
près de Vouziers ? de rétention des paysans ardennais,
dès le 1er juillet 1940.
Les fameuses tentes où logeaient 18 personnes.
Le parking rempli de voitures et de camionnettes.
La queue pour la distribution de nourriture.
En effet, à partir de cette date, par le biais de la WOL1,
les Allemands confisquent les terres agricoles
ardennaises pour les exploiter à leur compte?
Les conditions de vie sont dures à Tagnon où mourront un
certain nombre de réfugiés, jeunes ou très âgés, frappés
par la dysenterie.
Faits-divers, Le
Petit Ardennais du dimanche 14 juillet 1900, consultable sur le site
des Archives départementales des Ardennes
Cinq extraits du 14
juillet 1900 qui renvoient à nos Journaux de confinement !
--------------------------
Édition de cartes
postales
Arthur Rimbaud
Les conséquences de la boisson
Les coups de poing partaient vite?
AD 08 - Cote PERH44 / 42 - Le PDF du journal du jour : clic
ici
Le dessin d'Alain Sartelet
Les obélisques de la Chartreuse
du Mont-Dieu, entrée de la cour des Remises, un jour
d'été de l'année 1660, une aube rayonnante d'or pâle se
lève, il fait déjà chaud...
Restitution et
dessin Alain Sartelet.
_______________
Nous avons publié
d'Alain Sartelet :
La
principauté de Sedan.
21 x 30 à l'italienne. 180 p., 1991.
Givet et
sa région à travers les siècles.
25 x 30. 180 p. en quadrichromie, 2015.
- en
coédition avec le Musée de l'Ardenne :
Mézières. Les fortifications et la citadelle.
20 x 25,5. 92 p., 2005.
Retour
sur le pèlerinage de Neuvizy, évoqué dans le n° 5 de ce
journal
En avril 1752, à Neuvizy (Ardennes), alors qu?ils se
rendaient au catéchisme en traversant la forêt, les huit
enfants furent attirés par une statue de la Sainte
Vierge portant l?Enfant-Jésus, nichée au pied d?un chêne
sous un enchevêtrement de tiges de lierre. Ne comprenant
pas d?où elle venait et pris de frayeur, ils se mirent à
prier. Rentrés au village, ils firent part de leur
découverte. Dans un premier temps, on ne les crut pas.
Mais, peu à peu, les habitants de Neuvizy et des
villages environnant, même les plus incrédules, se
rendirent sur le lieu pour prier la Vierge.
Selon, les récits, les guérisons et les conversions se
multiplièrent. Les pèlerins vinrent de plus en plus loin
ce qui favorisa le développement du culte. En octobre
1752, la statue, suivie par une foule nombreuse quitta
la forêt et fut installée dans l?église de Neuvizy.
Elle y restera jusqu?en 1792. Un forgeron du village la
sauva de la destruction. Elle retrouve sa place quelques
années plus tard et de nouveaux miracles se seraient
produits.
Le culte de la Vierge perdure. Et c?est ainsi que l?on
peut trouver des chapelets portant une médaille à
l?effigie de Notre-Dame de Bon-Secours de Neuvizy.
Chapelet
et médaille de Neuvizy, Photos Marc et Anne Stampler.
...est enterré au cimetière Boutet à
Charleville-Mézières.
Photos : Fabien Archangeli.
Dans son ouvrage Cinq enfants dans un parc,
Simone de Saint-Exupéry, 2e fille de Jean et
s?ur d?Antoine, écrit : « L?horrible guerre 1914-1918 a
rapproché d?abord les membres dispersés de notre
famille. Puis la mort a frappé autour de nous. Du côté
paternel, la perte la plus douloureusement ressentie a
été la mort du commandant Roger de Saint-Exupéry, frère
cadet de notre père. Grièvement blessé à Messein, le 22
août 1914, il s?éteignait à Charleville le 9 septembre
suivant. Nous perdions en lui un appui efficace car,
depuis la mort de notre père, il nous considérait comme
ses enfants d?adoption. Antoine, le futur chef de
famille, avait fait de longs séjours au milieu de ses
sept cousins, six filles, un garçon, nés de deux
mariages. L?oncle et le neveu s?aimaient beaucoup. »
Présentation de la
bourrache par Hubert le Jardinier1,
dans Le Jardin d?Hubert, Jardin sauvage, jardin
nature
BOURRACHEBorragio officinalis
annuelle (Borraginacées)
Photo Elisabeth Lambert.
Synonyme :
Langue de b?uf, père de la sueur
Originaire d?Afrique, ma bourrache est arrivée un peu
par hasard dans mon potager. En fait, j?avais récupéré
un vieux paquet de graines périmées que j?ai jetées à la
volée sur un coin de terre.
Depuis la bourrache prend possession des espaces vides,
elle remplace et étouffe les herbes indésirables. Ce
sont les fourmis qui disséminent les graines. Attention,
il faut rester maître de la bourrache, car elle aussi
deviendrait ?mauvaise herbe?. Au printemps, elle
s?associe avec d?autres légumes, comble les rayons,
entre les lignes.
Dans mon potager, je la considère comme plante
décorative et engrais vert. Pacifique et facile à vivre,
la bourrache s?élimine en tirant légèrement sur la
plante.
Multiplication :
par
semis au printemps dans une terre profonde et légèrement
acide.
La petite
histoire raconte que... la
bourrache occupe les jardins depuis le Moyen Âge.
Ça se mange...
Rafraichissantes, les jeunes feuilles se consomment en
salade. Ses fleurs bleues en forme d?étoiles ornent les
plats de crudités et de charcuterie.
Préchauffer le
four à 190°C (th.6-7). Cuire les tiges de bourrache 20 min
dans de l?eau salée, égoutter. Préparer la béchamel (pour
plus de goût, j?ai fait revenir un oignon avec des lardons
allumettes fumés et j?ai ajouté un peu de noix de muscade
puis du jambon coupé en morceaux et en fin de cuisson du
gruyère.
Étape 2
Dans un
faitout, mettre à chauffer un peu d?huile d?olive et faire
dorer à feu moyen l?oignon émincé, puis ajouter l?ail
pressé. Verser les tiges de bourrache dans le faitout et
laisser revenir 10 min en remuant régulièrement, puis les
mélanger avec la béchamel. Beurrer des cocottes ou un plat à
gratin, les remplir avec la préparation. Mettre sur le
dessus quelques morceaux de jambon d?York et une tranche
d?emmental. Enfourner pour 20 min.
Photo Elisabeth Lambert.
Remarque :
Pour nettoyer les tiges de bourrache, enlever les gros
fils comme pour la rhubarbe, couper les tiges en
tronçons, les laisser tremper dans de l?eau très salée
pendant 10 minutes, frotter ensuite doucement avec la
main pour enlever toutes les épines.
Fleurs de bourrache, groseilles et rose trémières, un
printemps ardennais. Photo Elisabeth Lambert.
Les grives
Michel
Degré, ancien responsable du Centre d?initiation à la
nature de La Neuville-aux-Haies, lecteur attentif et
attentionné, nous a adressé ce texte.
« Les tenderies de grives en Ardennes
Description de l'aspect technologique de la tenderie aux
grives à partir d'observations faites à Laifour (Dames de
Meuse) en 1957
Nous sommes le 8 octobre. Le tendeur,
qui est aussi garde de la chasse, nous attend à son domicile
à 8 heures. Mais un brouillard épais règne dans les fonds de
Meuse et il faut attendre que le soleil se devine, les
grives ne se mettant au gagnage qu'au jour bien levé.
La tenderie court là-haut sur le plateau. Elle revient à son
point de départ après un parcours de 12 kilomètres agrémenté
de 1500 collets à terre et 4000 à l'arbre. C'est une grosse
tenderie mais il y en a des plus grosses. Le garde a mis en
bandoulière son ?bodet? panier plein de sorbiers et passé au
cou son faisceau de lacets. Sur place, il s'arme d'un petit
bâton fourchu servant au dégagement des passages entre les hayettes et la tournée commence sans autres cérémonies ni
explications. Je prends la suite et me voici déjà aux prises
avec les hayettes. C'est une cadence à prendre, tous les six
pas on lève la jambe plus haut et il ne faut pas accrocher.
Mon guide s'attarde à remplacer des sorbiers et marmonne
entre ses dents quelques vagues menaces à l'adresse d'une
certaine engeance. Il me montre à terre, à l'aplomb des
pliettes, des grignotages de baies qui sont sans aucun doute
l'?uvre de souris. A quelques centimètres sous chaque
perchoir, une brindille noire piquée dans le support. ?C'est
de la glu pour interdire aux rongeurs l'accès aux arceaux?
me dit-il, "mais cela ne les empêche pas toujours?. Ces
déprédations s'étendent sur quelques centaines de mètres,
puis cessent brusquement. ?C'est par taches, ajoute-t-il, il
n'y a pas de souris partout?.
Les grives ne chantent pas en cette saison, mais font
entendre une légère modulation étouffée qu'une oreille
avertie peut discerner. Mon guide a entendu, il s'arrête
brusquement en me faisant signe d'écouter. Je n'entends rien
que son chuchotement. ?Il y en a !?. Le soleil perce
lentement la brume au fur et à mesure de notre montée. On a
déjà ramassé cinq ou six victimes à terre ou à l'arbre. A un
tournant, un soudain bruit d'ailes et un ramier s'envole à
grand bruit. Il a cassé le lacet dans un ultime sursaut
d'évasion. En effet, non seulement le lacet à terre est
cassé au ras du piquet mais les suivants, par où il est
venu, sont écrasés ou accrochés à la hayette. Tout cela est
réparé en un tour de main. Et la marche sautillante reprend.
Le sentier s'avance sur un promontoire de roche qui domine
la vallée. Une mer de brouillard absolument plane sur
laquelle flotte un radieux soleil d'automne. Le passage
n'est pas très actif. ?Les oiseaux arrivent souvent de nuit
par petits groupes et se reposent deux ou trois jours avant
l'étape suivante.? Mais cette fois, j'entends un piaillement
tout proche devant nous. C'est une grive prise par la patte,
qui signale sa présence en nous entendant. Le tendeur
explique que les grives ainsi capturées sont intactes et se
remettent très bien en captivité de leurs émotions. Ces
oiseaux vivants sont recherchés pour servir d'appelants à la
chasse au poste dans le midi de la France, où les routiers
les transportent en 24 heures dans une quelconque boîte en
carton. Chez nous on ruse avec la grive affirme le piégeur.
?C'est un art et une passion. Tout le monde peut tirer un
oiseau posé sur un arbre qui supporte le cageot de
l'appelant, mais est-ce de la chasse ?? La grive d'un coup
de pouce mortel est passée dans le panier à sorbier. » La
prochaine prise est un beau merle mâle pris à l'aile. Il
pépie à notre arrivée comme le font les grives. Plus loin
les lacets à terre sont dérangés sur 30 mètres et l'auteur
du méfait doit être piégé si c'est un quadrupède nuisible,
chat, putois, martre, fouine, hermine, hérisson. Les
sangliers, dont les tendeurs disent qu'ils font la tenderie
?comme un homme" comptent parmi les prédateurs de la
tenderie.
Plusieurs fois, le tendeur en jetant une grive dans son
panier murmure : ?Celles-là, c'est les meilleures.? Sa
classification ne se pique pas d'ornithologie, il y a les
roussettes qui sont les plus réputées et les grisettes. ?À
vrai dire je défie le plus fin connaisseur de les distinguer
en les croquant. Mais il faut aussi, en rentrant à la
maison, leur palper le bas-ventre ; s'il est dur,
c'est-à-dire plein de baies en digestion, ce seront les
meilleures? car nul n'ignore qu'on ne vide jamais les
grives. ?S'il est mou et vide on hoche la tête mais on les
mange aussi et personne ne fait la différence.? Plus tard en
saison on prendra les grosses draines ?tia-tia? et les
litornes aux pattes noires. Mais voilà le garde qui s'abat
brusquement à genoux devant une hayette. Que se passe-t-il ?
Il a du même coup d'?il vu que le lacet du barrage manquait
et aperçu à quelques centimètres du sentier quelques plumes
rousses qui dépassaient des fougères. C'est une superbe
gélinotte qu'il me fait admirer amoureusement, et je me
demande comment il a pu découvrir cet oiseau enfilé sous les
fougères et dont deux centimètres de queue d'un mimétisme
parfait avec sa cachette pouvaient dépasser. Le collet est
cassé autour du cou et la pauvre bête, comme le ramier ce
matin, se remettait de ses efforts. Le crin est dégagé,
l'oiseau est mis à l'essor. Le règlement prescrit deux crins
de cheval mais n'en dit pas la grosseur. Or, elle varie avec
la race, la taille du cheval et les tendeurs cachent
jalousement leurs fournisseurs attitrés. Les plus malins les
reçoivent par poste des Pyrénées, en échange de leurs
grives. Les tendeurs à qui j'ai montré ce texte ont souri à
ce passage. La gélinotte est une capture suffisamment rare
pour qu'elle soit conservée, et sa chair suffisamment bonne
pour qu'elle soit consommée. Malgré le règlement qui oblige
à les rapporter en mairie, jamais, de mémoire de tendeur, il
n'a été respecté !
Mais pourquoi mettre des lacets forts, quoique
réglementaires, à cet endroit plutôt qu'à tel autre sur les
12 kilomètres ? ?C'est que?, dit-il, ?en y passant tous les
jours, les tendeurs lèvent de temps à autre, sous bois, des
gélinottes et ils savent qu'elles s'y reposeront deux ou
trois jours. Il suffit alors de garnir les hayettes de ce
secteur de lacets forts, sur une centaine de mètres?
D'ailleurs d'une année à l'autre, elles fréquentent toujours
les mêmes remises. Cela facilite la chose. Quant aux
bécasses qui sont coureuses mais non percheuses, elles
choisissent pour s'abattre au sol ce qui, vu d'en haut, leur
paraît être un trou dans les frondaisons, leur permettant
d'accéder sans obstacles à la terre ferme. Comme les
anciennes places de charbonniers, les clairs d'un bois mal
planté, les jeunes plantations, les affleurements rocheux où
rien ne pousse. De ce terrain d'atterrissage, elles gagnent
le gaulis voisin. Elles sont donc localisées et vouées aux
lacets de crin de mulet. À la fin de la journée le tableau
est de 52 pièces dont 2 merles, 2 bouvreuils et 5 grives
abîmées.
En ce moment même, à la porte, 5 ou 6 personnes attendent la
distribution. Dès que le tableau est connu, d'autres
accourent et il faut agir avec diplomatie et discernement
pour que des spéculateurs n'en fassent un commerce. Le garde
et sa femme ont dans la tête la carte de rationnement du
village et tout se passe dans la bonne humeur générale. La
tenderie que nous venons de relever produit bon an mal an de
1000 à 1500 grives qui se disputent sur place au prix de 120
francs pièce sans que jamais les tendeurs mettent à profit
l'abondance de la demande pour hausser les cours. Il est
fixé pour la saison. Les hôtels ne s'en procurent qu'en
seconde main et les vendent toutes rôties 250 francs pièce.
Mais c'est en pâté que le rendement est le meilleur parce
que, malgré la queue de la grive piquée en témoin au sommet
de la croûte, on ne sait pas trop s'il n'est pas fait comme
celui de l'alouette, 1 grive pour 1 cheval. Le tendeur se
fait donc en cette année 1957 un revenu de 120 à 150 000 F
en deux mois mais au prix de quelle fatigue et de quel
travail préparatoire. Par contre, la matière première de ses
pièges lui est fournie gratuitement par la nature comme le
veut la tradition.
Le tendeur, respecté comme un être à part qui connaît les
secrets de la forêt est toujours un amoureux de la nature.
Sa vie est au bois où il jouit par tous ses sens des
splendeurs de l'automne !
Tiré de ESTIVANT, A.1962 Les tenderies de grives en
Ardennes, in Bulletin des Fédérations des Chasseurs de la
Moselle, Meurthe-et-Moselle,Vosges, Meuse, etc. n° 62, p.
27-29, n° 63, p 13-15.
Nous avons traité longuement de la tenderie aux grives dans
deux articles parus dans le n° 20 de Terres Ardennaises,
consacré à la chasse :
Didier Bigorgne, La tenderie aux
grives : traditions et contestations, p. 30-39.
Jean Clerc, La tenderie aux
grives : des mots, des procédés, des usages, p. 41-46.
Nous accompagnons ce texte de deux
recettes tirées du livre de Monique Esquerré-Anciaux,
Cuisine des Ardennes, Denoël, 208 pages.
De ce
même n° 20, nous extrayons l?article écrit par le célèbre
journal La Hulotte et la bande dessinée d?Yves Kretzmeyer.
Lire Interview de ?La Hulotte?
«
Le drôle de sport de Toto Craigno », Terres Ardennaises n°
20, octobre 1987,
pages 6-10.
Clic sur
l'image >>>>>>
Lire Yves Kretzmeyer
«
Casimir La Bricole », Terres Ardennaises n°
20, octobre 1987,
pages 75-77.
Clic sur
l'image >>>>>>
La pêche
Comme nous avions écrit un n° 20 de Terres
Ardennaises, entièrement dédié à la chasse ? vous
pouvez en lire d?ailleurs des extraits dans ce journal
?, le n° 128 ne traite que de la pêche.
Malheureusement, un oubli fâcheux de notre part nous a
conduits à ne pas l?indiquer sur la couverture !
Pour la grande majorité d?entre nous, la pêche est une
activité de loisirs. Et pourtant, comme le raconte
Patrice Bertrand, la pêche fut aussi professionnelle sur
la Meuse !
Lire Patrice Bertrand
«
La
pêche professionnelle en Meuse, entre Givet et Dun », Terres Ardennaises n°
128, septembre 2014,
pages 11-17.
Clic sur
l'image >>>>>>
Collection Dominique Mézières.
Deux photos de Caroline Puissant, photographe pour
?l?Aappma l?Avenir? d?Asfeld, de brochets, qu?elle a
légendées ainsi « J'ai bien quelques photos de brochets
mais à leur plus petite taille, car c'est au moment où
nous les ramassons dans la pêcherie. »
La page des jeux - Solution du jeu du
journal 15 - Châteaux
des Ardennes - Philippe Duplayé
Téléchargez
la
solution >>>>
La page des jeux - Sudoku -
Jean-Marie Jolly
Téléchargez
la grille de jeu >>>>
si vous disposez de
la version Acrobat Reader DC
alors vous pouvez la compléter
directement avec l'outil ?Remplir et signer?.
sinon imprimez-la.
Réponse à ?Où sommes-nous ?? et solution
du sudoku ci-dessus.